Comment un mensonge ruine une réputation, une carrière, le Pr Michel Aubier en a donné une brillante démonstration. Auditionné en avril 2015 par la commission d’enquête du sénat sur le coût de la pollution atmosphérique, il avait déclaré n’avoir aucun lien d’intérêts avec les acteurs économiques. Pourtant, le 16 mars dernier Libération et le Canard enchaîné révèlent le contrat liant le pneumologue à Total. Selon Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP interviewé dans le journal Le Monde du 29 mars dernier, concernant le professeur Michel Aubier, « ce cas regrettable est représentatif de cette absence de conscience de ce qu’est un lien d’intérêt. Il illustre aussi les risques que cela fait courir à l’institution : c’est toute l’AP-HP qui a été mise en danger dans sa crédibilité ». Résultat, le Sénat a décidé de porter plainte pour fausse déclaration. Le scandale illustre les conclusions du rapport de la Cour des comptes afin de renforcer la transparence. Les magistrats de la rue Cambon pointent cette fois les « failles majeures » des grandes institutions sanitaires de l’État. Sont particulièrement visés le CEPS (Comité économique des produits de santé) et l’Oniam (Office national d'indemnisation des accidents médicaux). Le taux d’anomalies relevé par la Cour dépasse 40 % dans ces deux organismes. La HAS (Haute Autorité de santé), l’ANSM (Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé) et l’Inca (Institut national du cancer) se révèlent de meilleurs élèves. Toutefois, les fautes les plus fréquentes (deux tiers des cas) concernent le défaut de mise à jour annuelle des déclarations d’intérêts. Elles relèvent donc plus de la négligence que de la volonté délibérée d’occulter des informations.
Atermoiements
Quant à l’État, il est accusé d'atermoiements dans la mise en place du site ministériel unique censé accueillir toutes les déclarations encore consultables sur différents sites. « Plus de quatre ans après l’intervention de la loi, le site unique n’existe toujours pas, bien qu’il ait été prévu par le décret du 9 mai 2012 », écrivent les auteurs.
Au-delà des bons ou mauvais points distribués, le rapport prend en compte la difficulté à recruter des experts indépendants de haut niveau. Les nouveaux traitements contre l’hépatite C sont un cas d’école où le CEPS lors de consultations a fait appel à des experts déjà recrutés par différents laboratoires pour des missions d’appui. Et suggère le développement d’un modèle de convention tripartite associant l’hôpital, le médecin investigateur et le laboratoire pharmaceutique. Le versement direct d’honoraires au praticien ne serait pas autorisé dans ce cadre. Autre piste déjà proposée par ailleurs, la mission d’expert sanitaire devrait être davantage reconnue dans le déroulement des carrières universitaires. Le coût de gestion pour les organismes est loin d’être marginal. Il s’élève à moins de 180 euros par dossier. Pour l’ensemble des cinq organismes contrôles, la dépense s’élève à 800 000 euros.
Mieux contrôler
Enfin, la plus grande faille du dispositif est contenue dans l’absence de dispositif de contrôle des déclarations. L’objectif ne serait pas de déresponsabiliser les organismes de leurs obligations. Mais d’exercer un contrôle en rapport avec le haut niveau de technicité du secteur. Ce nouveau rôle serait dévolu à la HAS. La nouvelle présidente de la HAS sera-t-elle prête à accepter cette nouvelle mission au sein d’un cahier des charges déjà bien rempli ?
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