« L’Homme augmenté m’intéresse, quand il s’agit de remplacer, restaurer, réparer, explique Bernard Bioulac. Mais la question aujourd’hui est : que faire avec toutes les données dont nous disposons ? »
Coordonnateur du Groupe d’étude* sur Les Interfaces Cerveau-Machine (Décrypter et Utiliser le code neuronal), Bernard Bioulac n’hésite pas à alerter sur les dangers du transhumanisme à la mode : « Les tentations ont toujours été grandes de manipuler et dépasser la condition humaine. Entre les années 1950 et 1970, le psychiatre R. Heath affirmait guérir des schizophrènes par la stimulation du système de récompense ou prétendait avoir transformé un homosexuel en hétérosexuel ! Aujourd’hui le courant de pensée transhumaniste évoque l’homme implanté et connecté au cloud, détenteur d’une intelligence infinie et bientôt immortelle… »
Les rapports entre science et éthique n'ont pas fini de l'interroger : « Face aux technoprophètes largement financés par les GAFA, j’espère que nous saurons trouver un équilibre où l’homme gardera son intégrité, où l’esprit et le corps resteront au centre de notre société. Car une chose est certaine : il est impossible de stopper la science, sous peine de régression de l’homme. Alors, il nous reste à défendre notre société bâtie sur les valeurs aristotéliciennes et une éthique attachée au caractère sacré de la personne… pour éviter les emballements et dérapages des apprentis sorciers. »
L’Histoire à la lumière des neurosciences
L’histoire contemporaine hante aussi Bernard Bioulac. « J’ai toujours cherché à comprendre comment le peuple allemand, riche d’une telle culture philosophique, artistique… a pu ainsi disjoncter… » La montée des fascismes, la question des génocides… Il passe ces sombres pages à la lumière de ses recherches : « J’aimerais écrire sur réseaux neuronaux et stratégie politique. Sur la construction neuronale des comportements, les processus décisionnels, le pouvoir de la motivation, la recherche de plaisir, essayer de comprendre pourquoi en Yougoslavie ou au Rwanda, tout un segment de la population peut s’unir pour détruire. »
Une volonté humaniste de comprendre pour mieux lutter contre les horreurs du monde. À mille lieues de la vision fataliste que lui confièrent un jour François Mitterrand et Roland Dumas, lors d’une conversation pendant la guerre de Bosnie : « Vous savez, quand des gens veulent se battre, on ne peut rien faire pour les arrêter. »
* groupe commun à l’Académie des Technologies et à l’Académie Nationale de Médecine
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