CERTES, ce n’est pas un sondage à proprement parler. Mais, même si une « clause de prudence » s’impose, l’enquête lancée du 27 juillet au 6 septembre par l’Espace Éthique de l’AP-HP, sous la direction du Dr Marc Guerrier, s’appuie sur le grand nombre des réponses recueillies par le truchement de deux sociétés savantes, la SFAR (Société française des anesthésistes-réanimateurs) et la SRLF (Société des réanimateurs de langue française), du réseau de surveillance grippe Sentinelles (INSERM U 707), ainsi que de l’ensemble du personnel du CH de Charleville-Mézières (Ardennes), en partenariat avec l’ORS Provence-Alpes-Côte d’Azur. En tout 4 600 professionnels de santé, dont une moitié de médecins, ont répondu au questionnaire sur la stratégie vaccinale A(H1N1) et ses enjeux éthiques.
C’est surtout la question 13, qui, comme dit le Dr Guerrier, « va fournir du grain à moudre à nos décideurs de santé », tout comme au débat public qui s’instaure, ces temps-ci, autour des mesures antipandémie : « En automne-hiver 2009, pensez-vous que vous souhaiterez être vacciné contre le virus A(H1N1) ? » Les deux tiers des médecins répondent que c’est leur intention. Mais 30 % disent qu’ils n’en sont pas sûrs (30,7 % pour le CH de Charleville-Mézières, 29,3 % pour les praticiens SFAR-SRLF et 20,1 % pour les membres du réseau Sentinelles). Mieux (ou pire), 10,3 % des hospitaliers SFAR-SRLF et 7,8 % des médecins du CH de Charleville-Mézières annoncent qu’ils sont sûrs de ne pas se faire vacciner. Une proportion qui descend à 2,1 % des déclarants au titre du réseau Sentinelles (il est vrai très concerné par le sujet).
L’Espace Éthique a mis en ligne* les arguments des uns et des autres, en un débat qui ne fait que commencer. Ne s’agit-il que d’un problème de transparence scientifique, qui ferait défaut et justifierait un complément d’information pour apprécier le bénéfice-risque du vaccin ? C’est la lecture de plusieurs responsables syndicaux (lire ci-dessous). Pourtant, la même enquête indique que la majorité des professionnels s’estiment correctement informés.
Une réticence qui n’est pas nouvelle.
Pour le Dr Guerrier, ces données sur le vaccin pandémique doivent être, en fait, étroitement corrélées à celles, bien connues, sur le vaccin contre la grippe saisonnière : « Seulement 40 % des répondants se sont fait vacciner au cours des trois dernières saisons grippales et 1/3 aucune fois. Les médecins qui se sont fait systématiquement vacciner contre la grippe saisonnière sont globalement les mêmes qui déclarent être sûres de vouloir se faire vacciner contre le virus A(H1N1). Autrement dit, les soignants ne sont généralement pas, et de longue date, les bons élèves de la vaccination. » Somme toute, le contexte pandémique ne modifierait pas une réticence connue depuis longtemps en France.
En filigrane sont ainsi posées des questions sur la protection des soignants, celle de leurs proches, la propagation éventuelle de l’épidémie par des acteurs de première ligne, ainsi que l’exemplarité du corps médical devant une opinion soumise à diverses influences. Autant d’éléments qui nourrissent le débat et risquent d’alimenter la polémique.
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