Alors que le Covid gagne du terrain un peu plus chaque jour, de nombreuses voix s'élèvent, un peu partout en France, pour demander un élargissement du couvre-feu, voire un reconfinement partiel.
À commencer par le Pr Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique. Interrogé ce matin sur RTL, il estime que le couvre-feu doit être « au minimum » durci et étendu face à une situation « difficile, voire critique » et une deuxième vague épidémique « brutale ». Selon lui, « la deuxième vague va probablement être plus forte que la première » et le nombre de cas réels approche « les 100 000 par jour » (la barre des 50 000 cas confirmés en 24 heures ayant été franchie dimanche).
« Un ou deux trains de retard »
Pour le Pr Delfraissy, « deux hypothèses » permettront de juguler cette deuxième vague. Première hypothèse, celle d'un couvre-feu plus massif dans ses horaires, son étendue, dont on pourrait tirer un enseignement au bout de dix à quinze jours, et aller ensuite vers le confinement. Seconde hypothèse, aller directement vers un confinement « moins dur que celui du mois de mars » en permettant le travail, une activité scolaire et un certain nombre d'activités économiques, et de plus courte durée, avec un déconfinement passant par un couvre-feu. « Plus on prendra des mesures rapidement, plus elles auront une certaine forme d'efficacité », a-t-il insisté.
Des mesures rapides, c'est également le souhait du président (LR) de la région Grand Est, Jean Rottner, qui a appelé le gouvernement à ouvrir une « large concertation » avec les corps intermédiaires et les élus locaux pour préparer un « reconfinement adapté aux situations locales ». Médecin urgentiste, le président de région préconise « d'insister plus particulièrement sur les zones où l'on a plus de 1 000 cas positifs pour 100 000 habitants ».
Lui aussi appelle à préserver « une certaine forme d'activité économique, adapter nos transports en commun, étaler les heures de prise de travail et conserver l'activité scolaire ». Jean Rottner souhaite que le président « s'exprime » et « débute une forme de dialogue pour que la France ne soit pas bloquée ». « L'épidémie est devant nous et nous avons un ou deux trains de retard », a-t-il averti.
Confinement national
Ces propositions rejoignent celles de deux médecins du CHU de Lille, le Pr Philippe Amouyel et le Dr Luc Dauchet*, auteurs d'une tribune publiée dans le « Journal du dimanche » et qui appellent à instaurer un confinement « écocompatible » dès ce lundi.
« Quand nous saurons s'il y a eu un effet du couvre-feu, le nombre des hospitalisations aura quand même déjà doublé et pourrait quadrupler en cas d'échec rendant la prise en charge de tous ces patients insurmontable », indiquent les deux hospitaliers. Pour eux, la « seule mesure efficace » pour limiter les contaminations est le confinement national. Mais là encore, il doit être ciblé selon les régions, et permettre le maintien des écoles, collèges et lycées, de l'enseignement supérieur à distance, des transports en commun… Les médecins appellent de plus à développer une stratégie d'identification des cas asymptomatiques « par des campagnes de dépistages systématiques » avec des tests rapides en population générale.
Directrice adjointe de l'Institut Pierre Louis d'épidémiologie et de santé publique (Sorbonne Université) et membre de l'Académie des sciences, Dominique Costagliola estime également dans le même journal qu'en ne reconfinant pas, on « recule pour sauter encore plus mal ».
Ce samedi, les médecins libéraux de l'URPS de la région Auvergne Rhône-Alpes, l'une des plus touchée par la pandémie, demandaient de leur côté un « élargissement immédiat » des horaires du couvre-feu à partir de 19 heures en semaine, et l’instauration d’un confinement le samedi et dimanche. « Il est encore temps d’agir pour éviter une situation comparable à celle du Grand Est, voire de l’Italie, du printemps dernier », estiment les professionnels de la structure, pour qui « le temps n’est plus aux demi-mesures ».
* Respectivement professeur en santé publique au CHU de Lille et directeur général de la Fondation Alzheimer, et maître de conférences en santé publique au CHU de Lille
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