DE NOTRE ENVOYÉE SPÉCIALE
« C’EST un geste politique fort », s’est réjoui Bruno Spire, le président d’AIDES. Cette fois, et contrairement à la conférence de Mexico de 2008, la ministre de la Santé a fait le déplacement. « Je me devais d’être à Vienne », a-t-elle lancé. Sur le stand de l’association, la ministre s’est fait dépister par un militant, devenant « ainsi la première personne utilisatrice du dépistage démédicalisé hors protocole de recherche », précise l’association. Venu rencontrer les acteurs, scientifiques et associatifs, de la lutte contre le VIH, Roselyne Bachelot a voulu rassurer sur la nouvelle orientation du plan toujours en préparation, et dont une première version rendue publique avait suscité de vives critiques.
« Audace, détermination, innovation, renouvellement et générosité : tels sont les grands principes qui inspireront le cinquième plan français de lutte contre le VIH », a-t-elle indiqué, en précisant qu’y seront intégrées toutes les contributions sur le sujet, celles de la Haute Autorité de santé, de France Lert et Gilles Pialoux et de l’INSERM sur la réduction des risques chez les usagers de drogues.
Traitement précoce.
C’est d’ailleurs par la remise très officielle du rapport du Pr Patrick Yéni sur la prise en charge des personnes infectées par le VIH qu’elle a ouvert sa conférence de presse. Les recommandations ne seront disponibles à la Documentation française qu’à partir du 15 septembre mais elles devraient s’articuler autour de trois modifications principales : traitement précoce dès 500 CD4/mm3 au lieu de 350 CD4/mm3, dépistage élargi dans la population générale et répété pour certains groupes ciblés, nouvelles formes de prévention qui intègre le traitement antirétroviral non plus dans l’intérêt direct du patient mais dans celui de son partenaire et de la population générale. « Force est de constater qu’avec 6 000 à 7 000 nouvelles contaminations par an, la prévention fondée sur le préservatif masculin n’est pas complètement satisfaisante », a souligné le Pr Yéni.
Les mesures annoncées vont dans ce sens. « Nous devons dorénavant changer de paradigme pour banaliser le dépistage en direction de la population générale, le déstigmatiser, pour que chacun prenne conscience qu’il peut être concerné par cette épidémie », a indiqué la ministre. Le dépistage dans la population générale devrait être renforcé dans le cadre du système de soins, « en particulier avec les médecins traitants ». Toutefois la réelle nouveauté, présentée comme la « mesure phare », du plan sera bien le dépistage réalisé par les non-professionnels de santé, une vraie « révolution sociétale », s’est réjouie Roselyne Bachelot. Elle souhaite que « dès 2011, au moins 10 centres de dépistage réalisés par des non-professionnels de santé puissent ouvrir en France, en bénéficiant de financements pérennes ». Ces centres auront pour vocation de permettre l’utilisation la plus large possible des tests rapides d’orientation diagnostique, en dehors des situations d’urgence et en dehors du système de soin. L’aspect juridique de cette mesure est encore à l’étude.
Centres de consommation.
La ministre de la Santé a aussi affirmé sa volonté de réformer en profondeur le dispositif de dépistage anonyme et gratuit actuellement en vigueur, conçu il y a vingt ans. Elle souhaite aller plus loin que la simple fusion des CDAG et des CIDDIST en créant des centres de santé sexuelle. Enfin, à la suite du rapport de l’INSERM favorable à la mise en place expérimentale de « centres de consommation supervisés » pour les usagers de drogues, la ministre a assuré qu’elle allait engager une concertation avec tous les partenaires concernés, et notamment les collectivités locales, comme à Marseille et à Paris, où une réflexion sur le sujet a déjà été menée.
Le plan devrait être lancé cet automne. Le Conseil national du sida et la Conférence nationale de santé devraient participer aux discussions. Les annonces de la ministre de Santé ont été accueillies plutôt favorablement. « La lutte contre le VIH avance », a estimé AIDES. Act Up, de son côté, fidèle à sa réputation de poil à gratter, forgée tout au long de ces réunions internationales, a pris à parti la ministre, lui reprochant entre autres le projet de taxation (droit de timbre) à l’entrée de l’Aide Médicale d’État qui pénaliserait encore plus les malades. « Vous faites payer les malades… Elles coûtent combien nos vies ? », a hurlé un militant. La lutte contre le VIH garde son souffle.
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