Président de la République de 1995 à 2007, premier ministre de Valéry Giscard d'Estaing (1974-1976) puis de François Mitterrand (1986 à 1988), maire de Paris de 1977 à 1995, Jacques Chirac, décédé jeudi dernier, aura fortement marqué de son empreinte le secteur de la santé.
Étau
En commençant par une séquence conflictuelle : l'adoption des ordonnances Juppé (1996), incarnation de la maîtrise comptable en santé, restera un traumatisme, voire une forme de trahison pour la médecine de ville. La désillusion fut d'autant plus marquée que le candidat Chirac avait fait sa campagne sur la « fracture sociale ». Dans une interview au « Quotidien » (photo d'archive ci-contre), le futur chef de l'État se disait « hostile à la remise en question du caractère libéral de notre système et, en particulier, à la liberté de choix du médecin par le patient ». Surtout, il rejetait tout plafonnement des dépenses de santé, soit l'inverse de la politique lancée aussitôt par Alain Juppé. Au menu : la création d'un objectif national de progression des dépenses maladie (ONDAM), voté dans le cadre d'une loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS), et la mise en place de sanctions éventuelles contre les médecins trop dépensiers.
Outre le vote annuel séparé du budget de la Sécu au Parlement, l'étau s'était resserré sur la santé : hausse de la CSG, création de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), mise en place d'agences régionales de l'hospitalisation (ARH) ou encore nouveau système d'accréditation et d'évaluation des services hospitaliers. Dès sa première année de septennat, la CSMF entrait « en guerre » contre la maîtrise comptable et le risque de « rationnement » des soins.
Réconciliation
Son second mandat (2002-2007) sera placé sous le signe de la réconciliation. En ville, Jacques Chirac fait son mea culpa (le plan Juppé est un « très grave malentendu ») en promettant de tourner la page des sanctions. Il promet aux libéraux, en pleine grève des gardes, la revalorisation du C à 20 euros en échange d'efforts sur les génériques. La signature de la convention de 2005 confirmera ce climat de confiance en partie restauré.
Concernant l'assurance-maladie, la réforme de 2004 acte la maîtrise dite « médicalisée » des dépenses de santé – avec la création théorique du DMP –, instaure le médecin traitant chef d'orchestre du parcours de soins coordonnés, propose une meilleure définition des ALD, promeut la coordination ville/hôpital et généralise les démarches qualité (création de la HAS, accréditation des équipes médicales) sans oublier de responsabiliser le patient. La loi instaure une contribution forfaitaire sur les actes médicaux et de biologie, fixée à un euro dans la limite d’un plafond annuel de 50 euros. À l'hôpital, il met en branle la réforme de la tarification à l'activité (T2A), qui se concrétisera en 2008 par Roselyne Bachelot, sous Nicolas Sarkozy.
Mais c'est sans doute sur la santé publique que Jacques Chirac aura marqué les esprits. Farouche combattant dans la lutte contre le cancer, pour l'égalité des droits et des chances des personnes en situation de handicap et pour la sécurité routière, il restera le président de ces trois causes nationales ce qui, in fine, contribuera à sa popularité.
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