Entrée en vigueur le 1er mai, la nouvelle réglementation sur le temps de travail – 48 heures de travail par semaine en moyenne réparties en 10 demi-journées dont huit en service hospitalier et deux en formation – reçoit un accueil mitigé des internes. En pratique, les aménagements sont jugés peu compatibles avec l’apprentissage de leur métier.
Le service pédiatrie de l’hôpital Mignot, au Chesnay (Yvelines), s’est réorganisé. Les futurs médecins et leurs responsables s’accommodent au nouveau rythme. Sur les 12 internes accueillis dans le service, six assurent l’activité des urgences et de la permanence des soins tandis que six autres gèrent l’hospitalisation conventionnelle et les consultations des enfants. Au milieu du semestre, les deux groupes tournent.
Un planning prévisionnel (informatique) a été mis en place pour chaque trimestre. Les internes y inscrivent leur temps de présence, leurs cours et gardes (comptabilisés dans le temps de travail), le repos de sécurité et leurs congés. Cette organisation repensée par la chef de service, le Dr Sylvie Nathanson, permet en théorie de respecter la législation (48 heures par semaine en moyenne, sur trois mois).
Progrès social
Sur le papier, la réglementation marque la reconnaissance de l’ensemble des tâches accomplies par les internes. « Pour la première fois, nos heures de travail sont comptées, la réforme est effective, les tableaux de présence sont consultables et les chefs jouent le jeu, se réjouit Florence, 26 ans, interne en médecine générale. Le décret de février 2015 est considéré comme un progrès social. « Avant on n’osait pas partir avant notre chef », explique Émilie, future pédiatre.
Les mentalités évoluent mais en pratique, les internes continuent souvent à travailler au-delà du seuil réglementaire. Marie, en 4e année d’internat de pédiatrie, reconnaît « faire entre 50 et 52 heures par semaine ». « Je ne suis pas censée être là cet après-midi, mais j’ai tenu à rester quelques heures pour faire la contre-visite, explique-t-elle. Je ne trouvais pas logique de ne pas aller jusqu’au bout avec les patients vus ce matin. On ne peut pas nous imposer de travailler plus de 48 heures par semaine mais nous pouvons le faire de nous-même ». Dans le cas d’une activité non programmée, l’interne est indiqué sur le planning comme étant « en activité non obligatoire mais présent », précise Sylvie Nathanson.
Seuil trop rigide ?
De fait, les internes travaillent souvent bien davantage que les 48 heures réglementaires, non par obligation mais par choix. « La médecine est un métier intense qui s’apprend à l’hôpital, en faisant ces heures, pas chez soi, affirme Émilie, qui porte un jugement assez négatif sur cette réforme. Vouloir passer de 70 à 48 heures par semaine est excessif. »
Le changement de réglementation est aussi accueilli avec réserves par les médecins seniors. « Le temps de présence que n’assurent plus les internes est compensé par les PH, souligne le Dr Pierre Foucaud, président de la CME de l’hôpital Mignot. Pour certains services, c’est un casse-tête ». Comme nombre de ces confrères, le médecin redoute que l’apprentissage pratique s’effectue plus lentement. « Nous ferons le bilan de notre organisation à la fin du semestre », annonce le Dr Nathanson.
À l’inverse de nombreux autres établissements, l’hôpital Mignot s’est donné les moyens d’appliquer la réglementation. « Nous engageons un pari en appliquant ce décret, explique le Dr Sébastien Monnier, référent des internes de l’établissement. Que ce rythme devienne la norme comme le repos de sécurité ».
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