À l'occasion d'un déplacement à l’Institut Curie, le président de la République a annoncé que l'État allait soutenir 12 nouveaux instituts hospitalo-universitaires (IHU) et 4 nouveaux bioclusters « de dimension mondiale », destinés à « franchir un cap » en matière de recherche biomédicale.
Sur les 12 IHU présentés, 10 sont d'ores et déjà labellisés IHU et bénéficieront donc d'un financement de 20 à 40 millions d'euros chacun, et deux sont des projets « IHU émergents », assortis d'un financement de 5 millions d'euros, avec 5 millions d'euros supplémentaires selon leur évolution. « Ces centres sont non seulement des lieux de formation des professionnels de pointe, mais aussi un terrain d'expérimentation des nouvelles modalités de soins et des viviers de partenariats ambitieux entre industriels, chercheurs et cliniciens », s'est félicité le locataire de l'Élysée.
Les dix projets labellisés sont : VBHI (université de Bordeaux, maladies vasculaires cérébrales), Prism de Villejuif (Centre national de médecine de précision en oncologie et Gustave Roussy, Villejuif, oncologie), re-Connect (Institut Audition et Cognition et Institut Pasteur, Paris, troubles de l'audition), Prometheus (Université Paris Saclay, Garches, sepsis), Thema-2 de Paris (Institut européen de la leucémie et Fondation de l'Université Paris-Cité, Paris, hématologie), Cancers des femmes de Paris (Institut des cancers des femmes et Institut Curie, Paris, cancers gynécologiques), Everest (Centre français de recherche intégrée en hépatologie et Fondation pour l'Université de Lyon, pathologies hépatiques), RespirERA (Fondation partenariale Université Côte d’Azur, Nice, maladies respiratoires), Immun4Cure (CHU de Montpellier, maladies auto-immunes systémiques) et InovAND (Fondation de l'AP-HP, neurodéveloppement pédiatrique). Les deux IHU émergents sont : HealthAge (CHU de Toulouse, gérontologie et vieillissement) et Infiny (Institut des maladies inflammatoires chroniques intestinales de Nancy, maladies inflammatoires de l’intestin).
Les projets « sont à maturité et les financements vont être finalisés dans les tout prochains jours », promet Emmanuel Macron.
300 millions d'euros pour les bioclusters
Les bioclusters sont de nouveaux dispositifs, dotés d'une enveloppe globale de 300 millions d'euros. Ils doivent constituer des guichets uniques facilitateurs regroupant des laboratoires, des centres de recherche, des centres de soin et des entreprises du domaine de la santé. « Ils nous permettront de faire émerger des écosystèmes à une échelle suffisamment significative », espère le ministre délégué chargé de l'Industrie, Roland Lescure.
À Paris, le biocluster Brain & Mind (B & M) sera consacré aux neurosciences. Il rassemble 20 cofondateurs dont l'Institut du cerveau de Paris, l'Institut de la vision et la fondation FondaMental. Quant au Marseille Immunology Biocluster, il fédère l'Université Aix-Marseille, l'Inserm, le CNRS, l'AP-HM, l'hôpital de Brest, la SATT SE et plusieurs sociétés de biotechnologie. Articulé autour du Lyonbiopôle, le Biocluster français d'innovation en infectiologie (BCF2I) comprendra l'Inserm, l'Institut Pasteur, l'Université Paris Cité, en collaboration avec l'ANRS-MIE, et sera localisé dans le Biodistrict Lyon-Gerland. Enfin, le biocluster GenoTher, consacré aux thérapies géniques, agrège 30 acteurs, tous situés dans la région Paris-Évry, dont le Génethon, le Génopole, l'université d'Évry, Yposkesi ou encore l'AP-HP. Ces quatre bioclusters rejoignent ainsi le Paris-Saclay Cancer Cluster, déjà annoncé fin 2022.
Chacun d'eux recevra un soutien financier de l'État, « de l'ordre d'une centaine de millions d'euros », nous promet Matthieu Landon, conseiller industrie, recherche, innovation et numérique de l'Élysée. Le but affiché est le même que pour les IHU : parvenir à terme à attirer des cofinancements privés en mesure de prendre le relais de la force publique. « L'idée, c'est vraiment de faire ce qui a pu se faire à Boston, où on voit qu'au niveau d'une ville, on a vraiment une concentration d'un très grand nombre de start-up, de laboratoires de recherche de très haut niveau et d'hôpitaux d'excellence », complète Matthieu Landon.
Lors de son discours, Emmanuel Macron a indiqué que les industriels partenaires des différents projets se sont engagés à cofinancer, à terme, « à 100 voire 200 % » les cinq bioclusters.
Une enveloppe globale de 7,5 milliards pour la stratégie Innovation santé 2030
Ces deux appels d’offres (IHU et bioclusters), lancés au milieu de l'année dernière, s'inscrivent dans la stratégie Innovation santé 2030, visant à « renforcer le positionnement de la France en matière d'innovation en santé ».
Présentée en juillet 2021, cette stratégie prévoit 7,5 milliards d'euros d'investissement dans la recherche, dont un milliard consacré à la création de centres d'excellence et de bioclusters, 550 millions consacrés à la recherche dans le cadre de quatre priorités stratégiques (numérique, biomédicaments, maladies infectieuses émergentes et dispositifs médicaux innovants), et 110 millions dédiés à des programmes de recherche exploratoires.
Les IHU, un modèle novateur au modèle économique fragile
Cette annonce porte à 19 le nombre total d'IHU dont les premiers ont été créés en 2009. Originellement, ces structures devaient être financièrement indépendantes en décembre 2020, grâce à des activités de valorisation de la recherche, et ne plus compter sur les quelque 60 millions d'euros perçus annuellement de la part de l'État.
Si certains IHU ont tiré leur épingle du jeu, à l'image de l'IHU de Strasbourg - Institut de chirurgie guidée par l'image - dont la thématique attire facilement des industriels comme Siemens et Olympus, la viabilité économique n'est pas au rendez-vous pour la majorité d'entre eux. En février 2022 un rapport du Sénat préconisait que l'État poursuive son soutien aux IHU, au-delà de 2024, compte tenu de leurs effets bénéfiques sur la recherche translationnelle, l'attractivité de la recherche et la mobilisation des financements.
« La part de cofinancement augmente progressivement, assure Matthieu Landon. La logique qui prévaut pour la nouvelle vague d'IHU est la même : investir fortement, et ensuite, accompagner les IHU dans une trajectoire où il y a de moins en moins de cofinancements publics nécessaires et de plus en plus de cofinancements privés. Il faut assumer qu’on ait une forme de souplesse sur les dates à partir de laquelle l'équilibre financier se fait. »
D'autres mesures sont en cours dans le cadre du plan « Innovation santé 2030 », comme la création de 40 à 50 nouvelles chaires, qui font actuellement l'objet d'un appel à projets, à raison de 2 millions d'euros maximum par chaire. Un jury co-présidé par le Pr Alain Fischer doit commencer à se réunir dans les prochains jours pour commencer la sélection.
Le président a également demandé aux ministères de la Santé, de la Recherche et de l'Enseignement Supérieur et au ministre délégué à l'Industrie de mener des concertations pour aboutir à un plan d'actions pour une recherche plus unifiée et efficace, et à renforcer l'industrialisation du processus technologique en France. « Sur beaucoup de projets que nous avons financés ces dernières années, on a vu trop souvent le processus industriel se développer ailleurs. Parfois, parce que nous sommes trop lents, trop complexes », regrette-t-il.
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