Je fais partie du très faible pourcentage de médecins ayant refusé les primes de la nouvelle convention, et je suis affligé de lire les couvertures des magazines de la presse médicale. Il y est fait l'éloge du fameux P4P dont il semblerait que la traduction acronymique de Payment for performance et non four ( 4 en anglais) se soit mal faite! .
On fait de ce paiement à la performance (en français) une avancée considérable pour les médecins; en effet, jusqu’à maintenant, on ne savait pas qu'il fallait vacciner la population (tiens au fait pourquoi seulement la grippe?) qu'il fallait surveiller et normaliser nos patients hypertendus et/ ou diabétiques, afficher nos horaires de consultation ( il me semble que cela figure depuis bien longtemps sur nos plaques professionnelles!!) et que, avoir un dossier informatisé permettait d'avoir un meilleur suivi des patients ( j'ajoute qu'éditer une ordonnance par l’informatique est plus lisible pour le pharmacien et pour le malade , et est sécurisée par le filtre du logiciel qui alerte sur les interactions, allergies ou intolérances). Je dis bravo à toutes les têtes pensantes qui nous annoncent tous ces "scoops"( en franglais) et qui ont bien mis quinze ans à s'en rendre compte ! ( et encore, l'estimation est faible)
Comment tolérer une telle infantilisation?
Je ne fais pas partie des confrères rétrogrades qui rechignent à utiliser l'informatique et, en même temps, se plaignent de crouler sous la paperasse; les nouvelles technologies permettent de gagner du temps, et de travailler presque en temps réel; je déplore que ces techniques ne soient pas encore utilisées à 100 % de leurs possibilités; c'est un progrès extraordinaire pour les patients et les médecins; que ceux qui le nient reviennent à la voiture à cheval pour faire leurs visites!
Mais a-t-on besoin que l'Assurance maladie nous le dise- comme si cela était leur découverte- et agite des poignées d'euro pour nous en convaincre?
Qu'on fait nos syndicats, notre Ordre, nos ministres, pour faire évoluer notre métier, le moderniser, le tirer vers le haut ? Rien, si ce n’est de répéter à l’envi que la médecine française est la meilleure au monde, sans se soucier de l’avenir
Bien au contraire, ils ont tous contribué à la dégradation des conditions d'exercice, et à la démotivation des jeunes médecins; ce n'est pas en supprimant les gardes de nuit, et en se laissant dicter notre métier par les bureaucrates de l'assurance maladie et des agences régionales de santé, que l'on va relever le niveau.
Comment voulez vous motiver les jeunes quand autant de médecins se plaignent sans cesse ? Leur a t'on dit un jour que la médecine générale est un beau métier, utile, intéressant voire passionnant, qui apporte beaucoup de satisfactions, mais aussi quelques contraintes, et que, si on ne les accepte pas, il vaut mieux sans doute, se tourner vers d'autres horizons; il faudrait peut-être avancer le serment d'Hippocrate à la première année d’études, pour éviter qu'il ne se transforme ensuite en serment d'hypocrite...
Je n'appartiens à aucun syndicat, et je m'en félicite, car j'aurais bien trop honte d'apporter mon soutien à une organisation qui contribue à dévaloriser mon métier; les représentants syndicaux ont -ils encore l'expérience de la médecine à force de fréquenter les salons parisiens?
J'ai 58 ans, j'accueille des stagiaires de fin de quatrième année, à qui je fais découvrir la médecine générale; je leur fais entrevoir qu'il n'y a aucun complexe d'infériorité à exercer la médecine générale, mais au contraire une fierté. En toute modestie, je pense qu'ils ne sont pas déçus.
Je ne sais pas comment va évoluer notre métier; toujours est- il que je ressens une amertume certaine envers ceux qui l'ont, et qui continuent à le saborder.
Je ne sais pas comment va évoluer notre métier; toujours est-il que je ressens une amertume certaine envers ceux qui l'ont sabordé (et qui continuent).
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