La lombalgie commune est extrêmement fréquente. Favorisée par le tabac, la sédentarité, des facteurs professionnels l’amyotrophie mais pas le surpoids, elle altère la qualité de vie des patients, est facteur de désinsertion sociale et professionnelle et coûte cher à la collectivité. Sa prise en charge a radicalement changé. D’où la vaste campagne de sensibilisation de l’assurance maladie visant grand public et professionnels de santé (livret d’information).
La clinique guide la prise en charge. L’imagerie n’est utile que pour éliminer un diagnostic différentiel ou une complication. « Il n’y a pas de corrélation entre images radiologiques et douleur. L’imagerie n’a pas d’intérêt pour vérifier que le patient a mal. Il a mal, on le croit. Et savoir à 30 ans qu’on a une colonne de petit vieux n’aide pas à se bouger », souligne le Pr Serge Perrot.
La peur du mouvement, préjugé délétère
Préjugés et idées fausses sont légion. Si le patient est bien dans son lit même mou, l’achat d’un lit dur ou d’un coussin ergonomique ne sert à rien, une étude randomisée (1) l’a démontré. La peur du mouvement, un préjugé partagé médecin/malade, est un facteur prédictif péjoratif de chronicité.
Avant on conseillait d’attendre de ne plus avoir mal pour bouger. « En fait, même en phase très douloureuse, bouger (selon ses capacités) évite le cercle délétère qui amplifie et enkyste la douleur », souligne le Pr Perrot. « Un arrêt de travail court d’une semaine, s’il peut aider un patient à devenir proactif, commencer la kinésithérapie ou le sport, sera inutile s’il reste au repos », précise le clinicien. La kinésithérapie en phase douloureuse aide à acquérir tôt les bons mouvements et postures. Le non sportif débutera par un sport global (natation, tai-chi, Pilates…), de façon progressive, fractionnée, et encadrée par un antalgique une heure avant. Quant au sportif, s’il adapte la durée et l’intensité de l’effort, aucun sport n’est interdit (ski, équitation…).
En aigu, les antalgiques permettent de bloquer le message douloureux nociceptif en périphérie, de favoriser la remobilisation précoce, et d’éviter la chronicisation. « Ne pas avoir peur de taper fort au début. Associer anti-inflammatoires et antalgiques (standards ou de pallier II). Recourir aux infiltrations en aigu dans les radiculalgies (en chroniques elles sont inutiles). Il n’y a pas de douleur utile qui évite l’usure discale », précise le Pr Perrot.
Demander au patient ce qu’il fait chez le kiné ou l’ostéopathe
En chronique, les morphiniques sont déconseillés (risque de chronicité et d’abus) et les antalgiques réservés aux exacerbations aiguës (1 heure avant un effort). Privilégier les approches non médicamenteuses (rééducation, exercice physique adapté, acupuncture, approche ergonomique adaptée au travail de force ou de bureau), et évaluer insatisfaction au travail, dépression, conflits et litiges. « Plus la douleur est chronique, plus elle est liée au mouvement et au cerveau » résume le Pr Perrot. Ne pas promettre la guérison, mais de longues périodes de rémission. « Demander au patient ce qu’il fait chez les autres professionnels de santé. Il doit bouger et se muscler chez le kinésithérapeute (massages, courant électrique sont peu efficaces). Chez l’ostéopathe qui doit être agréé, si les manipulations lombaires peuvent soulager en aigu, vérifier l’absence de manipulations dangereuses (à l’étage cervical, ou craquement de toutes les vertèbres) », précise le Pr Perrot. La ceinture lombaire s’avère très utile en période douloureuse (elle permet le mouvement) et lors de sollicitation du rachis en torsion (déménagement…), elle rappelle les mouvements préconisés.
En cas d’addiction, mésusage, échec thérapeutique ou de problématiques complexes à évaluer, adresser dans un centre de la douleur.
(1) Kovacs FM al., Lancet 2003 Nov 15;362(9396):1599-604.Effect of firmness of mattress on chronic non-specific low-back pain
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