Cancer du côlon : pas de risque accru après cancer du sein

Publié le 18/03/2001
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D EUX études publiées en 1994 rapportaient une majoration du risque de cancer colo-rectal dans les suites d'un cancer du sein. Néanmoins, la faible augmentation du risque relatif mis en évidence dans ces études n'a pas incité à inclure un examen digestif systématique dans le cadre du suivi des femmes atteintes de néoplasie mammaire. Un groupe d'experts en oncologie a établi en 1998 que l'augmentation du risque chez ces femmes pouvait être considéré comme équivalent à celui lié à un cancer colo-rectal dans la fratrie. En l'absence de quantification précise du risque, une équipe d'oncologues américains dirigée par le Dr Craig Newschaffer (John Hopkins Hospital, Baltimore) a proposé d'étudier l'incidence des cancers colo-rectaux dans une cohorte de femmes chez qui un cancer du sein a été diagnostiqué pour la première fois entre 1974 et 1995. Au total, l'étude a porté sur 227 165 patientes âgées en moyenne de 62 ans au moment du diagnostic, suivies en moyenne pendant cinq ans.

Trois grandes périodes ont été considérées

En raison des variations thérapeutiques de la prise en charge avec la mise sur le marché de nouveaux produits, les auteurs ont individualisé trois grandes périodes : de 1973 à 1984, avant la mise sur le marché du tamoxifène, de 1985 à 1989 période intermédiaire, et 1990-1994 qui correspond à l'utilisation généralisée de cette molécule.
« Au cours du suivi, 2 202 cancers coliques et 660 cancers rectaux se sont déclarés », expliquent les auteurs. Globalement, on peut considérer que le risque de cancer colique a été inférieur de 5 % chez les femmes atteintes de néoplasie par rapport à la population globale. Celui des cancers rectaux a, pour sa part, été réduit de 13 %.
« Les mécanismes en cause dans cette réduction du risque ne peuvent être que spéculatifs en l'absence d'études spécifiques », expliquent les auteurs. Il semblerait qu'une partie des femmes incluses dans l'étude aient été traitées par hormones substitutives au moment de la ménopause. Or ce type de traitement semble, au vu d'études cliniques déjà publiées, diminuer le risque de cancer colo-rectal. Cette hypothèse paraît d'autant plus probable que l'incidence des cancers digestifs a été la pus faible dans les sous-groupes utilisant de façon préférentielle le THS : les femmes de plus de 65 ans, les caucasiennes et les femmes inclues dans l'étude après 1990.

Le tamoxifène

Un majoration du risque de cancer colo-rectal lors d'un traitement par tamoxifène a été pressenti depuis quelques années. C'est pour cette raison que les investigateurs ont procédé à des études de sous-groupes individualisés selon l'utilisation des antiestrogènes. « Les femmes sous tamoxifène n'ont pas présenté une incidence de cancers colo-rectaux supérieure à celle de la population générale », analyse le Dr Newschaffer.
Enfin, chez les femmes noires incluses dans l'étude, l'incidence du cancer rectal a été minoré par rapport à une population de femmes noires appariées alors que celle des cancers coliques s'est révélée identique dans les deux groupes. Pour les auteurs, « cette analyse doit être interprétée avec précaution en raison de la perte de puissance statistique des études en sous-groupes et de l'absence de suivi rigoureux de certaines patientes de la cohorte ».

« The Lancet », vol. 357, pp. 837-840, 17 mars 2001.

Dr Isabelle CATALA

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6879