DE TRES NOMBREUX produits transdermiques, dermatologiques ou cosmétiques contiennent des renforçateurs de perméation chimique (RPC) destinés à optimiser leur absorption par le derme. A l'heure actuelle, le nombre des molécules utilisables à cet effet est toutefois relativement réduit et ces dernières n'allient, en règle générale, que trois ou quatre activités fonctionnelles. Cette « offre » limitée s'explique par le fait que les bases mécanistiques sous-tendant le rendement de ces RPC demeurent très mal connues. C'est pourquoi des ingénieurs chimistes de l'université de Californie ont mené une recherche approfondie, fondée, entre autre, sur la spectroscopie infrarouge, pour tenter de percer les mécanismes permettant aux RPC de franchir la barrière cutanée, sans pour autant en altérer l'intégrité. Leur travail a porté sur une centaine de ces agents, sélectionnés à partir de dix classes distinctes : surfactants anioniques, cationiques, zwitterioniques et non ioniques, acides gras, esters acides, alkyl amines, composés dérivés de l'azone, sels sodiques d'acides gras et autres.
Modélisation moléculaire.
Après avoir calculé l'indice de renforcement (IR) et le potentiel irritatif (PI) de chacune de ces molécules, les auteurs ont eu recours à un procédé de modélisation moléculaire pour établir leurs propriétés physico-chimiques. Dans chacune des dix classes chimiques prédéfinies, il a été choisi une molécule, désignée comme étant le RPC de type sauvage. Une série de mutations des groupements fonctionnels a ensuite été opérée au sein des dix RPC de type sauvage ainsi obtenus, ce qui a permis de créer une librairie d'environ 325 mutants, dont l'IR et le PI ont été également mesurés.
L'équipe est ainsi parvenue à identifier les propriétés moléculaires fondamentales régissant les modifications de l'organisation microscopique de la couche cornée, ce qui leur a permis d'établir les facteurs clés conditionnant l'efficacité et la tolérance d'un RPC. De fait, l'obtention simultanée de ces deux objectifs impose de délicates contraintes qui concourent à limiter la puissance d'activité effective de la molécule. Les analyses spectroscopiques ont, en effet, révélé que, quelle que soit leur conformation chimique, les RPC franchissent la barrière cutanée en induisant la fluidification des assises lipidiques. De son côté, la réaction irritative engendrée par le RPC découle de la dénaturation des protéines de la couche cornée et apparaît directement corrélée au rapport entre la capacité de liaison de l'hydrogène et le degré d'interactions polaires.
Des milliers de mutants.
Au terme de ces études, qui ont permis d'établir les conditions indispensables à l'efficacité et à la tolérance des RPC, les auteurs ont conclu que, en utilisant les méthodes théoriques qu'ils avaient eux-mêmes employées, il devrait être possible d'élaborer plusieurs milliers de RPC mutants. Après évaluation de leur activité et de leur tolérance propres, ces molécules constitueraient alors un fond commun utilisable pour développer une nouvelle génération de produits transdermiques.
Karande P. et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition avancée en ligne.
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