Le développement professionnel continu

Complexité et étatisation accrues

Publié le 24/03/2011
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DÉJÀ EN 2006, deux mesures importantes avaient modifié les caractéristiques de la FMC. D’une part, était venue s’ajouter la notion d’« évaluation des pratiques professionnelles » (EPP), consistant à « analyser l’activité clinique d’un praticien par rapport aux recommandations professionnelles disponibles actualisées ». D’autre part, pour qu’une FMC soit « créditante », la structure assurant la formation devait obtenir l’accord d’un organisme agréé par l’HAS (Haute Autorité de Santé) et le Conseil National de FMC. « La pneumologie s’est très vite impliquée, remarque le Dr Bruno Stach (Valenciennes). C’est à ce moment-là qu’est née la Fédération française de pneumologie (FFP). Elle regroupe l’ensemble des associations de pneumologie, tant hospitalières que libérales et a obtenu le statut d’organisme agréé FMC (OA FMC) autorisé à créditer des formations. »

De plus en plus de contrôles.

Dans l’article 59 de la Loi HPST, les notions d’EPP et de FMC sont regroupées sous le terme de développement professionnel continu (DPC) qui prend aussi en compte « les priorités de santé publique et la maîtrise médicalisée des dépenses de santé ». « Ce n’est pas uniquement un changement de modalités, précise Bruno Stach, il s’agit de modifications considérables de l’ensemble de la structure du dispositif concernant la formation des médecins. »

Le Conseil National du DPC (CN-DPC), qui édicte les principes généraux et conseille le Ministère, diffère peu du précédent Conseil National de FMC. En revanche, la CSI (Commission scientifique indépendante) n’existait pas et l’OG-DPC (organisme de gestion du DPC) est différent.

- La CSI sera constituée de représentants d’organismes issus de chaque spécialité médicale appelés Conseils Nationaux Professionnels (CNP) eux-mêmes regroupés au sein d’une Fédération des Spécialités Médicales (FSM). La CSI élaborera des sujets de DPC d’intérêt national et les présentera au CN-DPC.

Afin que la formation en pneumologie reste à l’initiative des pneumologues, la FFP va devenir un CNP. « Cela représente une avancée importante. Avant, la FFP était simplement un organisme agréé vérifiant qu’une formation était conforme à la déontologie (non sponsorisée par l’industrie pharmaceutique, par exemple). Maintenant, la FFP proposera les sujets de formation au niveau national. »

- L’OG-DPC, comme le précédent organisme de gestion, est constitué de représentants de l’État et de l’Assurance-maladie, mais maintenant il intégrera aussi des médecins. Cet organisme est chargé de l’attribution des crédits aux projets de DPC acceptés par le CN-DPC.

- Le contrôle des actions de DPC effectuées par les médecins sera assuré par le Conseil départemental de l’Ordre des Médecins comme précédemment. En cas de non-respect de l’obligation de DPC, des sanctions pourront être engagées. Il sera donc important pour chaque médecin de déclarer les formations effectuées.

Les décrets d’application en attente.

La mise en place de la loi HPST sera effective en janvier 2012 mais il sera possible de s’inscrire dans des programmes de DPC dès la parution des décrets qui sont toujours en attente. En effet, le changement de gouvernement et la nomination d’un nouveau Ministre de la Santé ont suspendu la parution au Journal officiel (prévue pour fin 2010) des décrets d’application de la loi HPST. Selon les organismes professionnels, la participation des médecins dans l’OG-DPC serait en cours d’évolution vers une parité stricte entre les organismes de tutelle et les médecins. « C’est une bonne chose, estime Bruno Stach. Il est important que la profession soit représentée dans les structures qui interviennent sur le choix des sujets et sur les crédits de formation. »

Le financement, toujours la pierre d’achoppement.

Tous les médecins devront effectuer une action de DPC chaque année à partir de 2012. Le financement se fera au travers d’un « chèque DPC » (de valeur inconnue à ce jour) dont une partie sera versée au médecin pour compenser la perte de ressources et une partie à l’organisme de formation. Cependant, seuls les sujets de formation « prioritaires » incluant des considérations économiques pourront bénéficier de crédits accordés par l’OG-DPC. Être bien formé sur des pathologies coûteuses permet de faire des économies de santé. Aussi, seules les formations sur ces pathologies recevront des crédits. « Par exemple, un financement interviendra pour des FMC sur la BPCO ou sur les pathologies du sommeil mais pas pour une maladie rare comme le syndrome de Churg & Strauss. Avant, depuis 2006, toute formation donnait un crédit de points même si des projets d’intérêt national bénéficiaient de 20 % de crédits supplémentaires. »

À la question : « Cette évolution vous paraît-elle positive ? » Bruno Stach répond de façon mitigée : « Les notions d’EPP et de DPC ainsi que la formation sur des sujets prioritaires sont positives car elles favorisent l’amélioration des pratiques quotidiennes. En revanche, l’intervention accrue de l’État et de l’Assurance-maladie et la multiplication des organismes de contrôle rend ces procédures très complexes et déroutantes pour les praticiens. La FMC était peut-être insuffisante pour certaines spécialités mais en pneumologie, nous avions l’habitude de nous former auprès des nombreuses associations existantes. Nous n’avons attendu ni les points, ni les crédits, ni le DPC… ! En témoigne la participation importante aux sessions de formations et au CPLF qui a attiré cette année encore, plus de 3 000 participants médecins… »

D’après un entretien avec le Dr Bruno Stach, pneumologue libéral à Valenciennes et secrétaire adjoint de la Fédération Française de Pneumologie.

 YVONNE EVRARD

Source : Bilan spécialistes