Coronavirus : Le tri des patients pose question pour le CCNE qui réclame des « cellules de soutien »

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Publié le 13/03/2020
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Crédit photo : SPL/PHANIE

Le Comité consultatif national d'éthique (CCNE), présidé par le Pr Jean-François Delfraissy, a rendu ce vendredi un avis express à la demande du gouvernement sur « les enjeux éthiques liés à la prise en charge des patients atteints de Covid-19 et aux mesures de santé contraignantes qui pourraient être prises dans le cadre de la lutte contre l'épidémie ». Le CCNE a ainsi formulé dix points d'attention nécessaires dans ce contexte. Il appelle tout d'abord à la « responsabilité citoyenne » et insiste sur l'importance d'une confiance entre les pouvoirs publics et la population ainsi que sur la mobilisation des corps intermédiaires (syndicats, associations, entreprises) pour relayer les mesures prises auprès des citoyens. 

Le comité salue par ailleurs la décision du gouvernement d'avoir fait appel à un conseil scientifique composé d'experts pour éclairer les décisions politiques mais recommande également de s'appuyer sur « la contribution de la société civile ». Le CCNE préconise la mise en place d'une instance mixte au sein du ministère de la Santé « composée d'experts scientifiques de différentes disciplines incluant les sciences humaines et sociales conjointement avec des membres de la société civile issus des milieux associatifs ». Le Pr Delfraissy ayant été nommé président du conseil scientifique, a annoncé lors de la conférence de presse du CCNE qu'il se mettait en retrait de la présidence du comité le temps de sa mobilisation.

Le CCNE appelle également à la vigilance sur la protection des données de santé et la confidentialité de l'identité des patients atteints. Il invite également à soutenir « l'effort de recherche » et rappelle « que même dans des situations d'urgence, les pratiques de la recherche impliquant l'être humain doivent respecter le cadre éthique et déontologique ».  

Des cellules éthiques pour accompagner les décisions médicales

Concernant le système de soins, le comité recommande la mise en place de « cellules éthiques de soutien » dans les hôpitaux pour aider les médecins obligés de choisir quels patients soigner en priorité si les services de réanimation étaient débordés par l'épidémie de coronavirus. Ces cellules fourniraient « une aide pour les décisions médicales extrêmement difficiles que pourraient être amenées à prendre certaines équipes », a expliqué le président Pr Jean-François Delfraissy. L'avis d'une telle cellule permettrait d' « éclairer » une équipe « en désarroi, avant de prendre une décision », a-t-il ajouté. « Les ressources telles que les lits de réanimation et leur équipement lourd sont déjà des ressources rares qui risquent de s'avérer insuffisantes si le nombre de formes graves est élevé », prévient le rapport.

Dans ces conditions, les médecins peuvent devoir établir « des priorités, parfois dans de mauvaises conditions et avec des critères toujours contestables », poursuit le CCNE. « La nécessité d'un tri des patients pose alors un questionnement éthique majeur », ajoute l'organisme consultatif, en ajoutant que cela peut aboutir à traiter différemment les patients infectés par le coronavirus et ceux qui ont d'autres pathologies. En Italie, pays gravement touché par l'épidémie, les soignants sont déjà confrontés à de tels choix, en raison d'un trop grand nombre de malades graves par rapport aux équipements disponibles.

Le Pr Delfraissy a mis en garde : « Les Italiens sont dans une situation complexe, qui peut nous arriver en France », a-t-il affirmé. Et a ajouté : « Il faut sortir absolument de l'idée que nous avons un système de soins qui serait meilleur que les Italiens ».

(Avec AFP)


Source : lequotidiendumedecin.fr