Le Généraliste Quel est, selon vous, le point commun entre la légalisation de l’euthanasie, l’élargissement de l’assistance médicale à la procréation (AMP) aux femmes homosexuelles et la gratuité de la contraception pour les mineures ?
Jean-Luc Romero. Pour la première fois, des candidats à l’élection présidentielle prennent position «pour» ou «contre» l’évolution des lois de bioéthique. Je m’en réjouis. Parce qu’elles font appel à la conscience, ces questions ne touchent pas seulement les médecins, mais tous les citoyens. En raison de cela, normalement, elles devraient dépasser le clivage politique droite-gauche… Or ce n’est pas le cas.
En décalage par rapport à ses voisins européens, la France doit-elle bouger ?
J.-L.R. Nos lois de bioéthique sont, sans doute, les plus ringardes de toute l’Europe ! Dans les Pays-Bas, en Belgique, en Suisse, la réglementation en vigueur, en matière d’euthanasie, est ouverte et respectueuse. La Belgique et l’Espagne accueillent des lesbiennes qui viennent se faire inséminer. Garder des lois restrictives dans l’espace européen est stupide. Ceux qui ont les moyens peuvent facilement les contourner. Dans le passé, quand l’IVG était interdite, celles qui le pouvaient partaient à l’étranger se faire avorter. Les autres, elles, avaient droit aux tricoteuses ! Je trouve ça scandaleux dans un pays qui prône l’égalité !
Quelle est, selon vous, l’évolution la plus inéluctable ? Et le dossier qui est le moins susceptible de progresser ?
J.-L.R. Quand on sait que 94 % des Français (selon un sondage IFOP réalisé en 2011 pour « Sud-Ouest », Ndlr) souhaitent une évolution vers la légalisation de l’euthanasie, ne pas légiférer dans ce sens me paraît hypocrite… D’autant plus que la «?loi Leonetti?», qui n’est pas suffisante, a l’effet pervers d’allonger parfois les souffrances du malade. François Hollande, Jean-Luc Mélenchon, Eva Joly, se sont prononcés en faveur d’une évolution de la loi dans ce sens. La droite s’y est opposée. Sur la question des mères porteuses et sur les drogues, en revanche, les politiques sont frileux. Ils ont peur, d’une part qu’on les accuse d’autoriser la marchandisation du corps et, d’autre part, d’être taxés de laxisme.
Quel dossier vous tient le plus à cœur ?
J.-L.R. Les faits divers nous rappellent sans cesse que la légalisation de l’euthanasie est une priorité. François Hollande y est favorable. Il a compris que la France ne pouvait pas rester à la traîne des évolutions sociétales. Même s’il refuse toujours de prononcer le mot «euthanasie» – il a d’ailleurs tort de le faire –, sa proposition d’une loi pour mourir dans la dignité est assez claire sur ce point. Si François Hollande est élu président il y aura des évolutions importantes en matière de bioéthique.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature