Valvulopathies et endocardite infectieuse

La prévention s'allège, sauf pour les patients à haut risque

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Publié le 20/12/2018
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« Les données épidémiologiques publiées cette année et qui proviennent de bases de données nationales permettent de se faire une meilleure idée de l’hétérogénéité considérable du risque d’endocardite en fonction des antécédents des patients », explique le Professeur Bernard Lung, cardiologue à l’hôpital Bichat-Claude Bernard (AP-HP).

Si l’incidence en population générale en France est estimée à 34 cas par million d’habitants et par an (36 au Royaume-Uni), des études danoise et britannique montrent que ce chiffre augmente et passe à 1 500/3 000 chez le groupe à risque intermédiaire (présence d’une valvulopathie non opérée) et à 4 000/6 000 en cas d’antécédent de remplacement valvulaire. Enfin, chez les patients ayant un antécédent d’endocardite, l’incidence s’établit à 15 000 cas par million d’habitants et par an. Des données qui font dire au Pr B. Lung qu’il convient « d’être particulièrement vigilant avec ces personnes en n’hésitant pas à faire pratiquer un examen de microbiologie (hémoculture) et une échographie cardiaque d’indication large dès lors qu’elles présentent une fièvre inexpliquée ». De manière générale, la surveillance doit être active chez ces patients à haut risque.

Plus de mesures d’hygiène et moins d’antibioprophylaxie

Concernant la prévention de cette pathologie, le Pr B. Lung rappelle que « si pendant longtemps, on a mis en avant le rôle de l’antibioprophylaxie pour éviter de déclencher une bactériémie, ces recommandations ont depuis été revues à la baisse ». Elles préconisent désormais un recours à une antibiothérapie préventive « chez les patients à haut risque et uniquement pour certains gestes buccodentaires à risque hémorragique ».

De manière générale, le Pr B. Lung précise que « les restrictions sur le type de soins dentaires en prévention de l’endocardite sont beaucoup moins importantes qu’avant pour les patients à risque et que certains gestes conservatoires sont désormais possibles ». L’accent est désormais mis sur des mesures prévention moins spécifiques et notamment une bonne hygiène dentaire régulière pour éviter « les bactériémies du quotidien de faible inoculum dont on sait qu’elles peuvent entraîner des endocardites au fil du temps ». De même, « une bonne hygiène cutanée, une désinfection systématique des plaies et une limitation autant que faire se peut des gestes médicaux invasifs chez les patients à risque » sont fortement conseillées. 

Mieux dépister les valvulopathies

Concernant les valvulopathies, le Pr B. Lung souligne qu’ « il n’existe pas réellement de moyen de prévention et que l’utilisation des statines s’est d’ailleurs révélée inefficace pour ralentir la progression des valvulopathies dégénératives dont la prévalence augmente avec l’âge ». La seule attitude conseillée est de « bien surveiller le patient pour déterminer le moment où il faudra intervenir ». La technique alternative à la chirurgie qu’est le TAVI (Transcatheter aortic valve implantation) pourrait d’ailleurs être étendue à plus de patients si les résultats des études randomisées en cours sont concluants. Cependant, et « bien qu’il y ait peu de moyens de prévention, il demeure rationnel de mieux dépister les valvulopathies », affirme le Pr B. Lung qui insiste sur « la promotion de l’auscultation au stéthoscope dont le recours est encore insuffisant et qui permet un repérage plus précoce, garantissant un meilleur suivi à défaut d’avoir une incidence sur l’évolutivité de la pathologie »

Benoît Thelliez

Source : Le Quotidien du médecin: 9712