THEATRE
PAR ARMELLE HELIOT
M OLIERE au Français, c'est toujours un bonheur, et l'on peut pinailler sur telle ou telle production - c'est le jeu de la critique -, on est rarement déçu lorsque la troupe retrouve son patron ! Pour ce « Malade imaginaire », autant le dire d'entrée, on ne peut qu'être ravi. Le metteur en scène Claude Stratz qui signe pour la première fois un spectacle à la Comédie Française, mais dont on apprécie depuis longtemps la cohérence sensible, l'intelligence, la sûreté de trait, a pu s'appuyer sur une excellente distribution qui sert son propos avec tact et virtuosité.
Dans une maison comme inachevée, qui tourne tout entière autour de l'inquiétant fauteuil d'hôpital d'un malade irascible (décor et costumes d'Ezio Toffolutti), la comédie va un train vif, sans pause, sans temps mort.
Argan est dans une camisole d'hôpital et ne revêt sa robe de chambre cossue que pour recevoir ses rares visiteurs. Alain Pralon donne immédiatement au « malade » l'aigreur sombre, l'inquiétude méchante d'un hypocondriaque véritable. Il y a en lui quelque chose de vulnérable pourtant qui fait toute l'originalité d'une interprétation à la fois classique et très personnelle d'Argan. C'est immédiatement juste et jubilatoire et l'interprète ne faiblit à aucun moment, allant jusqu'à la folle violence quand ses filles lui résistent.
Face à lui, figure tout aussi importante, un des merveilleux personnages de femme du théâtre de Molière, la Toinette de Catherine Hiegel a l'acidité et l'humanité, l'audace, l'inventivité, l'énergie qui conviennent. C'est un pur bonheur.
Les jeunes sont très bien et très bien guidés : la petite Louison (Camille Lebert, ce soir-là) est aussi délicieuse, juste, que touchante et drôle. L'Angélique de Julie Sicard est fraîche et sensible et Eric Ruf défend Cléante avec élégance. Catherine Sauval, la belle et hypocrite Béline, joue tout en finesse aiguë. Thierry Hancisse, M. Bonnefoy inquiétant, Alain Lenglet, Béralde angoissé par Argan, sont également très bien. Christian Blanc compose un excellent Purgon, autoritaire et rubicond tandis que Jean Dautremay est un Diafoirus discrètement cauteleux. Parfait. On louera particulièrement Alexandre Pavloff qui crée, littéralement, un Thomas Diafoirus tout en tics singuliers, nettement inquiétant, formidable.
Claude Stratz ne craint pas les moments de farce un peu scatologiques - ils sont consubstanciels à Molière -. La musique (et les sons) signés Marc-Olivier Dupin s'intègrent parfaitement à la comédie, portés qu'ils sont par d'excellents interprètes, inscrits en bouffées de carnaval et scène hallucinante, lorsqu'enfin Argan, devient... médecin.
Comédie Française, salle Richelieu, en alternance, 20 h 30 en semaine, en matinée le dimanche, jusqu'en juillet (01.44.58.15.15). Durée : 2 heures sans entracte.
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