REFERENCE
Enfants conçus par IAD (insémination artificielle avec don de sperme)
Les enquêtes sont difficiles à réaliser d'un point de vue épidémiologique car il faut comparer de manière prospective une cohorte d'enfants IAD à une cohorte d'enfants « tout venant », pour voir si les troubles éventuels observés sont plus ou moins fréquents. Il faut aussi constituer un autre groupe de comparaison d'enfants conçus sans IAD mais après un long passé de stérilité, pour différencier la cause de ce que l'on va observer, l'IAD elle-même ou bien la longue attente du couple avant d'avoir un enfant.
Ces enquêtes doivent de plus être longitudinales car il est bien évident que les constatations à la naissance ne suffisent pas.
Lorsque tout cela est réalisé, on s'aperçoit que les enfants IAD ont un développement intellectuel un peu supérieur à la moyenne, qu'ils n'ont pas de pathologie spécifique et qu'ils sont sans doute un peu surprotégés par rapport à la moyenne.
La question des répercussions de l'attitude des parents concernant le secret sur le devenir des enfants est très difficile à étudier avec une telle méthodologie, car la date de révélation est très variable d'une famille à l'autre ; le suivi doit donc être au long cours pour intégrer cette donnée ; or, bien sûr, un tel suivi comporte au fur et à mesure des perdus de vue.
Aucune étude n'a pu donc actuellement infirmer ou affirmer le caractère pathogène de ce secret. En révélant l'IAD, les parents craignent surtout de traumatiser leur enfant et de fragiliser la position paternelle. Ils projettent sur l'enfant une réaction de désaveu de paternité. Leur attitude est liée au vécu de la stérilité : castration angoissante et non révélable ou, au contraire, épreuve sublimée et alors peut être verbalisable à l'enfant.
La position de certains « psys » en faveur d'une révélation systématique est critiquable car elle va dans le sens du primat du réel du biologique dans la filiation et met au deuxième rang la filiation narcissique. Une position jusqu'au-boutiste ne devrait-elle pas imposer aussi la révélation de leur conception aux enfants adultérins et faire des donneurs les « vrais parents » ?
Il faut aussi prendre en compte dans l'IAD le fait qu'il y a un anonymat du donneur et donc le risque de confronter l'enfant à une impasse.
La position des professionnels qui travaillent dans ce secteur est généralement d'accompagner les couples qui le désirent vers une solution en conformité avec leurs idées et leur vécu de la situation.
Enfants nés par FIV (fécondation in vitro)
Les FIV, tout comme les inductions de l'ovulation, confrontent les familles à un tout autre type de problème, celui de la fréquence des grossesses multiples.
L'étude scientifique du devenir des enfants conçus par FIV nécessite de séparer cette population en sous-groupes : les singletons, les jumeaux et les triplés.
L'étude des singletons réclame la même méthodologie que celle décrite pour les enfants IAD.
Le sous-groupe des jumeaux peut être comparé à une population de jumeaux « tout venant » ; enfin, le sous-groupe des triplés est simplement décrit en tant que tel.
Les résultats concernant les singletons sont très comparables à ceux des enfants IAD : légère avance intellectuelle et légère surprotection des parents.
Les jumeaux FIV sont comparés aux jumeaux « spontanés » ; or ceux-ci doivent être à leur tour divisés en deux sous-populations : celle des jumeaux dizygotes et celle des jumeaux monozygotes (étant entendu que les jumeaux « induits » sont presque tous des jumeaux dizygotes). Des trois sous-groupes, c'est celui des enfants FIV qui pose le moins de problèmes, car ils n'ont pas celui de la ressemblance des jumeaux monozygotes et la population des parents recourant à la FIV est différente des parents ayant des jumeaux spontanément, plus âgée et plus « installée » dans la vie, ce qui leur permet de faire face plus facilement au surcroît de travail qu'entraîne l'arrivée de jumeaux dans une famille, de se faire aider plus souvent. Ils risquent moins d'être entraînés dans un engrenage qui mène à la dépression, source principale, comme on le sait, de la psychopathologie du petit enfant.
Les triplés posent avant tout des problèmes médicaux pour la mère pendant la grossesse, pour les enfants du fait des risques de prématurité. Celle-ci entraîne de nombreux problèmes tant médicaux que psychologiques en début de vie : séparations, angoisses...
Dès le retour à la maison, les familles sont débordées par les tâches matérielles (24 biberons par jour, 700 couches par mois). Les mères souffrent particulièrement de l'insuffisance de temps à consacrer à chaque enfant, et donc de l'absence de plaisir. Les familles sont entraînées vers des mécanismes opératoires d'élevage. Elles souffrent aussi de la rupture du secret car avoir des triplés signe des difficultés à concevoir et le recours à la FIV. La dépression maternelle est quasi constante et longue. Il faut souligner la nécessité d'une aide globale pour ces familles, non seulement physique pour suppléer aux tâches de soins des enfants et aux tâches ménagères, mais aussi psychologique.
Les échecs de l'AMP
Il est important de rappeler que les échecs de ces techniques restent malheureusement nombreux ; près d'un couple sur deux y sera confronté. Les médecins ont alors un rôle important d'accompagnement à jouer pour éviter que le couple ne s'enlise dans l'amertume et la dépression. Il faut les accompagner dans ce nouveau deuil d'avoir un enfant par voie biologique afin de vivre dans de bonnes conditions un passage vers l'adoption ou de se résigner de manière sereine à vivre sans enfant.
Conclusions
L'AMP s'intègre dans notre société sans les bouleversements annoncés par certains.
Les équipes médicales doivent être attentives à la dimension psychologique de leur travail et offrir aux couples une aide si besoin.
Si les études concernant le devenir des enfants doivent être affinées, on peut déjà affirmer qu'il n'y a pas de psychopathologie particulière et spécifique retrouvée chez eux.
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