Décision Santé. Quelles sont les spécificités du modèle néerlandais en termes d’offre hospitalière?
Pascal Garel. La première grande caractéristique de ce système réside dans le fait que la totalité des établissements sont des hôpitaux privés à but non lucratif. Le secteur lucratif n’est pas autorisé malgré des débats sur ce sujet et quelques expérimentations. La Belgique et les Pays-Bas sont les seuls pays européens où le secteur privé à but lucratif n’est pas implanté. A ce jour, on compte 141 établissements, dont 8 hôpitaux universitaires, et leur densité par habitant étant très forte dans ce pays, on n’y rencontre pas de difficultés liées à des « déserts médicaux ». Il y a toujours un hôpital très proche des habitants. En revanche, on peut observer d’autres problèmes aux Pays-Bas comme des listes d’attentes encore particulièrement longues, malgré la réforme. Elles incitent les Néerlandais à partir se faire soigner à l’étranger, notamment dans les pays voisins.
D. S. Comment s’organise le financement ?
P. G. Comme dans la plupart des autres États membres de l’Union européenne (UE), le financement est assuré en grande majorité par les fonds publics, qu’ils proviennent de l’impôt ou des cotisations sociales. En moyenne, dans l’UE, 80 % des fonds des hôpitaux sont publics. Avant les réformes des années 2000, chaque hôpital aux Pays-Bas était doté d’un budget par capitation, c’est-à-dire en fonction du nombre de patients traités. Les choses ont ensuite changé avec l’introduction du dispositif Diagnosebehandelingcombinatie (DBC), reposant sur la définition d’un budget par diagnostic et incluant l’ensemble des coûts liés à une pathologie déterminée. Le pays a parallèlement introduit une mise en concurrence de ses caisses d’assurances, les assurés pouvant en changer chaque année. À ce stade, dans l’attente d’évaluations de cette mise en concurrence des assureurs, il semble que les patients hollandais n’aient pas beaucoup utilisé cette possibilité.
En revanche, cette mise en concurrence a changé la relation entre les caisses et les prestataires de soins, soumis à de nouvelles contraintes, comme des obligations de qualité et de tarif. La façon dont on fournit les soins aux Pays-Bas a sans doute évolué avec cette réforme.
D. S. Le modèle hospitalier néerlandais est-il coûteux, comparé aux autres pays de l’UE ?
P. G. Non, il est plutôt moins cher en parts de PIB que le système français, par exemple. Mais si cela peut être un atout pour le contribuable quand on se place dans la perspective d’un patient, il faut reconnaître qu’il existe moins de libertés qu’en France. La caisse d’assurance maladie décide par exemple du lieu des soins hospitaliers pour le patient. Sur le plan des indicateurs, le modèle des Pays-Bas est globalement bon : ainsi, le niveau de qualité des soins y est excellent. Cependant, il n’est pas exempt de faiblesses : j’ai déjà mentionné le problème des listes d’attente pas totalement résolu ; mais il y a aussi un problème d’attractivité de certaines professions médicales. Certains secteurs comme la pédiatrie sont en difficulté. Comme dans les autres pays, la main-d’œuvre vieillit et l’on se trouve de plus en plus confronté à la nécessité d’une nouvelle répartition des compétences entre les médecins et les infirmiers.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature