Les carabins ne veulent pas d’un stage obligatoire en zone sous-dotée avant l’internat

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Publié le 16/03/2019
Milieu rural

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Crédit photo : GARO/PHANIE

Après les amendements du projet de loi de santé visant à mettre un terme à la liberté d'installation, un autre vise à contraindre les étudiants à effectuer des stages en zones sous-denses. Ainsi, les députés ont voté mardi soir en commission le principe d’un stage obligatoire en zone sous-dotée pour les étudiants en médecine du 2e cycle. Celui-ci devrait obligatoirement être validé pour accéder à l'internat.

Les stages sont actuellement « très largement concentrés dans les milieux urbains », or « c’est la réalisation de ces stages dans d’autres milieux, et en particulier dans les territoires ruraux ou périurbains » qui « permettrait aux étudiants de découvrir une autre pratique de la médecine et ainsi les former et les inciter à la pratique dans ces zones », a justifié l'auteure de l'amendement dans son exposé des motifs.

Pas assez de MSU

L’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) est « totalement opposée » à cette proposition, indique sa présidente Clara Bonnavion au Généraliste. « Par définition, ce sont des zones où il y a peu de médecins. Et parmi eux, tous ne sont pas maîtres de stages, souligne-t-elle. Il y a donc un problème de faisabilité. »

« Une telle mesure nécessiterait de faire un sacrifice en envoyant des étudiants chez des médecins qui n’ont pas la formation de MSU, ce qui diminuerait la qualité de formation. Il en est hors de question », avertit Clara Bonnavion. De plus, les « zones sous denses sont plutôt éloignées des facultés, donc des lieux de vie des étudiants », fait valoir l’étudiante. « Ce qui implique des frais de transport et de logement. Mais nous avons seulement une aide forfaitaire de 130 euros pour un stage de trois mois si on s’éloigne du CHU. C’est largement insuffisant ! »

Déjà un stage obligatoire en MG pendant le 2e cycle

Surtout, la présidente de l’Anemf assure que les étudiants sont motivés pour effectuer des stages. « Et d’après les retours, ils sont souvent satisfaits de leur qualité, précise Clara Bonnavion. Mais avec 130 euros et pas de logement, certains n’y vont pas même s’ils ont envie d’y aller. »

Du côté de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG), les administrateurs ne se sont pas encore positionnés sur l’instauration de ce stage obligatoire. En attendant, le syndicat a toutefois averti les députés sur la nécessité de passer par un décret pour cette proposition, plutôt que par la loi santé. « Il sera plus facile de revenir en arrière s’ils passent par un décret », indique le porte-parole de l’Isnar-IMG, Pieter Prats. L'interne rappelle que les étudiants doivent théoriquement réaliser un stage en médecine générale de trois mois pendant leur 2e cycle (une obligation depuis 1997 réaffirmée en 2009). Or, tous les étudiants ne parviennent pas à en trouver. « La première chose serait déjà qu'ils y aient tous accès », estime-t-il.

Enfin, le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF, désapprouve lui aussi cet amendement. « On ferait mieux de mettre une incitation forte sur les étudiants de 3e cycle, ceux qui vont s’installer, estime le généraliste de Clamart. On pourrait très bien dire que tous les internes qui iraient faire leur stage en zone sous dense pourraient bénéficier pendant un an d’une rémunération supplémentaire, type CESP, de 1 200 euros par mois ». Et d’affirmer : « Je suis sûr que là, on aurait aucun problème de volontariat. Et ils découvriraient une médecine de premier recours qui est passionnante à exercer. »


Source : lequotidiendumedecin.fr