Les taxes sur les laboratoires n'ont pas permis de maîtriser les dépenses de médicaments

Publié le 18/03/2001
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T AXE sur la publicité et la promotion ; taxe sur les ventes directes aux pharmaciens; taxe sur les spécialités, versée à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ; reversements en fonction de la clause de sauvegarde prévue par la loi de financement de la Sécurité sociale ou des accords conventionnels ; baisses de prix régulières : les contributions demandées à l'industrie pharmaceutique tendent à se multiplier, si l'on en croit les responsables de plusieurs laboratoires réunis au MEDEC, dans le cadre du débat animé par le Dr Alain Marié, directeur médical du groupe Quotidien Santé.

Ainsi, affirme Véronique Ameye, directeur général adjoint d'Aventis, « en trois ans, les taxes imposées à l'industrie pharmaceutique ont augmenté de 53 % pour atteindre, en 2000, 5,1 % du chiffre d'affaires et sans doute 5,3 % en 2001 ». Des pourcentages qui pourraient être encore plus élevés les années suivantes si le décalage entre l'objectif de hausse des dépenses de médicaments fixé par les pouvoirs publics (3 % en 2001) et l'augmentation effective des remboursements devait s'accentuer. Pour 2000, les statistiques de la CNAM estiment que les dépenses de médicaments à la charge de l'assurance-maladie ont progressé de 11,9 %, loin des 2 % qui avaient été fixés. En 2001, la différence pourrait être du même ordre.

Une hausse naturelle de 6 % à 9 %

« Il y a une incohérence à vouloir fixer le montant des dépenses en fonction du PIB, affirme pour sa part Philippe Gehin, d'AstraZénéca, d'autant qu'il est impossible à l'industrie pharmaceutique de s'en tenir à cette évolution. Chacun sait que naturellement, sans excès particulier, on est dans une fourchette comprise entre 6 % et 9 % » d'augmentation.
Une analyse que rejoint Jean-Pierre Foucher, député UDF des Hauts-de-Seine, qui anime le groupe d'études du médicament de l'Assemblée nationale. « Lors de la discussion annuelle du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, dit-il, l 'objectif national des dépenses d'assurance-maladie (ONDAM) est fixé en fonction des perspectives de la croissance et jamais selon les impératifs de santé publics. Pour le médicament, c'est évidemment la même chose et nous sommes en pleine maîtrise comptable ».
Noël Renaudin, président du Comité économique des produits de santé, ne pouvait pas, évidemment, adhérer au raisonnement du parlementaire. « Le seuil de l'ONDAM représente, dit-il, la part réservée aux progrès et aux impératifs de santé publique, tout ce qui dépasse représente ce qui ne semble pas indispensable, tout en étant parfois nécessaire. »
Les taxes sont-elles alors trop importantes ? Si Noël Renaudin ne se prononce pas explicitement sur ce thème, il défend le principe des reversements et des baisses de prix. « Un médicament, dit-il, ne peut garder le même prix tout au long de sa commercialisation, en attendant que son brevet tombe dans le domaine public. Il est clair que, lorsqu'un concurrent puis un deuxième viennent sur le marché, les prix doivent tenir compte de cette concurrence . Ils doivent baisser à mesure que la concurrence arrive ».
Reste quand même le problème de la maîtrise des dépenses. Malgré toutes les taxes et le système conventionnel, elle n'est toujours pas assurée. N'est-ce pas la preuve que le système a échoué ? Jean-Pierre Foucher n'est pas loin de le penser, jugeant qu'il faut aujourd'hui agir sur d'autres acteurs que l'industrie pharmaceutique. Noël Renaudin est plus circonspect. « Il est vrai, dit-il, que malgré les reversements et autres taxes, les ventes de médicaments et les remboursements ont été plus importants que prévu. Peut-on dire pour autant que le système ne fonctionne pas ? Non, mais il est insuffisant, à lui seul, à régler le problème. »
Il faut donc trouver d'autres solutions. On n'en est pas là, mais « si les laboratoires, explique Patrick Errard, directeur général de Fujisawa, peuvent considérer comme normal de contribuer à l'équilibre des comptes, encore faut-il que les taxes que l'on impose soient justes et équitablespour tous ». Ce qui, a ses yeux, est loin d'être le cas, s'agissant notamment de la taxe sur la publicité qui frappe, dit-il, « non seulement les laboratoires sur leurs messages publicitaires mais aussi sur les salaires, les charges sociales, les frais, les contrats de prévoyance des visiteurs médicaux ».

Jacques DEGAIN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6879