E N faisant bombarder deux fois l'Irak avant de participer aux festivités du dixième anniversaire de la libération du Koweït, l'administration Bush a envoyé au monde arabe un message diplomatiquement compliqué.
Réalisés avec le concours de l'aviation britannique, les bombardements ont été dénoncés par les Européens et par le monde arabe. Cela fait maintenant des années que l'Europe a adopté une politique irakienne différente de celle des Etats-Unis, notamment en ce qui concerne l'embargo. Quant aux pays arabes modérés, ils sont tous en train de reprendre des relations normales avec Bagdad.
Interrogé sur la signification des bombardements, George W. Bush les a attribués à la « routine » militaire ; mais la nouvelle administration américaine ne cache pas que, si les bombardements sont rendus nécessaires par le renforcement des défenses irakiennes, notamment à l'aide d'un système de communication enfoui de lignes en fibres de verre, elle s'efforce de définir une politique plus cohérente à l'égard de l'Irak.
Les conseillers de M. Bush soulignent que le danger présenté par le régime de Bagdad n'a pas diminué, loin de là : non seulement Saddam Hussein n'a pas renoncé aux armes de destruction massives qu'il affectionne, mais il a réussi à se débarrasser des contrôles de l'ONU et il vend en secret, grâce à un oléoduc irako-syrien, une quantité supplémentaire de pétrole qui n'est pas incluse dans ses accords « pétrole contre nourriture et médicaments » conclus avec les Nations unies et dont le produit est sans doute affecté à mettre au point de nouveaux missiles et, sait-on vraiment ? des armes nucléaires ou chimiques et biologiques.
Le Koweït est le dernier pays arabe où la haine de Saddam n'a pas diminué et où George Bush père est considéré comme un héros. Le nouveau chef de la diplomatie américaine, Colin Powell, ancien chef de l'armada anti-Saddam, y est arrivé après un séjour en Israël et avant de se rendre en Syrie, où il avait des questions à poser sur l'oléoduc. Ses efforts en faveur de la paix et de l'arrêt de la violence sont tombés à plat à Ramallah, où il a rencontré Yasser Arafat, car, aux yeux des Palestiniens, Saddam Hussein est un héros, le seul leader arabe capable de tenir tête à la fois aux Etats-Unis et à Israël.
Le gouvernement de M. Bush ne peut pas faire l'économie d'une analyse approfondie : l'embargo a échoué, le peuple irakien est considéré comme une victime des sanctions internationales et l'Europe ne songe qu'à faire des affaires en Irak. Ce qui ne diminue en rien la volonté de Saddam Hussein de prendre sa revanche, contre les Etats-Unis, contre Israël (qui n'a fait que prendre des coups pendant la guerre du Golfe, sans jamais riposter) et contre le Koweït. Or les Etats-Unis, qui ont annoncé qu'ils s'impliqueraient dans les discussions sur le paix au Proche-Orient, doivent reconquérir leur crédibilité diplomatique et militaire dans la région. Tâche contradictoire qui est peut-être au-dessus de leurs forces.
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