La résistance de la dépression au traitement pharmacologique peut être partielle ou totale. « Elle concerne 30 % des patients » a affirmé le Pr Jean Michel Azorin (Marseille). Il faut rechercher la bipolarité, la comorbidité organique ou psychiatrique. « Nombre de résistances semblent liées à la pharmacocinétique » a noté de son côté le Dr Antoine Del Cul (Clinique du château de Garches). Des traitements concomitants tels que les anti-HTA, les AINS, les inducteurs enzymatiques ou tout simplement le tabagisme peuvent modifier la biodisponibilité. Néanmoins, les dosages plasmatiques d’antidépresseur ne sont pas faits en routine et ne permettent pas de confirmer une cause de résistance d’ordre pharmacocinétique. La fréquence insuffisante des séances de psychothérapie est aussi à envisager.
Parmi les stratégies, les experts proposent d’augmenter les doses ou de combiner avec le lithium ou de prescrire les cothérapies ayant des cibles différentes comme d’associer les antidépresseurs avec un antipsychotique à faible dose (Risperdal ou Abilify). Une association synergique puissante combine mirtazapine et venlafaxine. Le Dr Del Cul a reconnu un certain empirisme régnant sur la conduite à tenir. Différentes dimensions symptomatiques peuvent être prises en compte : les troubles de l’humeur, l’anhédonie et la baisse d’énergie pourraient bénéficier de molécules agissant sur la dopamine et la noradrénaline tandis que l’anxiété, les idées suicidaires, la culpabilité seraient plus accessibles aux antidépresseurs agissant sur la sérotonine et la noradrénaline.
Stimulation à envisager
Les IMAO sont remis au goût du jour malgré les contraintes d’un régime spécial pour éviter l’HTA liée à l’absorption de tyramine. La liste d’aliments interdits est assez limitative de telle sorte que « les patients se sentent peu gênés ». Beaucoup d’IMAO sont en phase d’évaluation. À côté de ces schémas assez classiques, on trouve pêle-mêle le zinc en forte dose, la mémantine chez les bipolaires, la lamotrigine dans les troubles de la personnalité ou des agonistes dopaminergiques qui s’évadent de leur indication neurologique. « On sent qu’ils agissent sur certaines dimensions mais c’est une course permanente avec une part d’incertitude » a estimé le Dr Del Cul.
Les traitements non pharmacologiques de stimulation comportent principalement l’électroconvulsivothérapie (ECT), la stimulation magnétique transcranienne et la stimulation du nerf vague. L’ECT a une efficacité largement prouvée sur les dépressions atypiques, les troubles bipolaires ou les dépressions à haut risque suicidaire ou associées à des troubles psychotiques. « 50 % patients ayant des dépressions résistantes sont répondeurs » a indiqué le Dr Wissame El-Hage (Tours). La stimulation du nerf vague est invasive et reste peu pratiquée même si elle a l’agrément de la FDA aux Etats-Unis. Elle a des effets indésirables limitants comme une dyspnée dans 10 % des cas, des anomalies de la voix dans 63 % des cas et une toux dans 20 % des cas. La stimulation magnétique transcranienne réitérée (rTMS) semble faire aussi bien que l’ECT sans les effets négatifs sur la mémoire. Le niveau de preuve reste inférieur à celui de l’électoconvulsithérapie. « La stimulation magnétique transcrânienne est à privilégier chez les jeunes et l’ECT est plus délétère sur le plan cognitif que le rTMS mais il n’y a pas de données comparatives » a conclu le spécialiste.
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