REFERENCE
Historique
C'est ainsi qu'Emil Kraepelin (1898) notait que les prodromes de ce trouble étaient l'irritabilité, la labilité de l'humeur, la distractibilité et la perte d'intérêt, voire les bourdonnements d'oreille avant les hallucinations. Plus tard, E. Bleuler parlera de « schizophrénie latente » pour des symptômes initiaux comparables associés à l'introversion et/ou l'excentricité. En 1932, Mayer-Gross insistera sur les manifestations insidieuses (par rapport aux formes à début aigu) de schizophrénie : diminution de l'initiative motrice, troubles du cours de la pensée, baisse de la capacité de concentration, méfiance, parathymie et hyperesthésie relationnelle. De même, en 1941, Zilboorg parlera de « schizophrénie ambulatoire », associant détachement de la réalité et tendance à se plonger dans un monde imaginaire... L'accent ne fut principalement mis sur le déficit des fonctions cognitives (altération de l'attention, de la mémoire et de la perception) qu'en 1961, ainsi que sur les troubles psychomoteurs (Chapman).
L'hypothèse neurodéveloppementale
Puis, l'épidémiologie analytique s'est attachée à identifier des facteurs de risque de schizophrénie, certains génétiques d'autres psychosociaux. Dans ce mouvement de recherche est née l'hypothèse neurodéveloppementale du trouble schizophrénique. Elle suggère qu'il y aurait des anomalies neuro-anatomiques et des dysfonctionnements neurophysiologiques à l'origine du processus pathogénique ; ceux-ci résulteraient d'incidents néonatals (traumatismes obstétricaux, contaminations virales, exposition à des toxiques, perturbations immunologiques...) ou d'autres avatars ultérieurs émaillant le développement du système nerveux central. Toutefois, ce n'est qu'entre 15 et 25 ans que la maladie s'exprimerait cliniquement, lors des remaniements psychologiques et biologiques suivant l'adolescence.
Marqueurs de vulnérabilité ou facteurs prédictifs
La traduction neuropsychologique de ces anomalies neurodéveloppementales, que ce soit le déficit attentionnel ou les autres dysfonctionnements cognitifs, les perturbations psychomotrices ou les troubles affectifs et comportementaux mineurs peuvent donc aussi bien être considérés comme des marqueurs de vulnérabilité ou des facteurs de risque prédictifs du trouble schizophrénique que comme des symptômes prodromiques. En tout état de cause, leur reconnaissance par le médecin (surtout le médecin de famille à ce stade) est donc particulièrement utile pour être vigilant sur l'évolution de l'enfant à l'adolescence et pendant les premières années de sa vie d'adulte. Certaines équipes - Recognition and Prevention of Psychological Problem (RAPP New York) ; Early Psychosis Prevention and Intervention (EPPI Melbourne) - vont même plus loin puisque des études pilotes ont été entreprises pour instituer un traitement devant l'association d'un risque familial, de troubles attentionnels objectivés par des tests neuropsychologiques et d'une baisse de compétences psychomotrices, afin de prévenir l'apparition du trouble schizophrénique (McGorry). Il serait actuellement imprudent d'avaliser cette pratique préventive même si certains résultats sont encourageants, un traitement antipsychotique ne devant être entrepris que lorsque le diagnostic de schizophrénie est confirmé. Quoi qu'il en soit, cette démarche souligne l'intérêt d'une reconnaissance précoce du trouble schizophrénique afin d'engager une prise en charge le plus rapidement possible pour en optimiser le pronostic.
Facteurs de vulnérabilité schizophrénique et/ou symptômes prodromiques
- Antécédents familiaux de schizophrénie.
- Complications obstétricales à la naissance.
- Moindres habiletés manuelles/sportives que les enfants du même âge.
- Retrait schizoïde (introversion, isolement social) pendant l'enfance ou l'adolescence.
- Baisse des performances scolaires (éventuellement authentifiée par baisse de QI).
- Anomalies cognitives (notamment baisse de l'attention et de la concentration).
- Troubles affectifs (oscillation de l'humeur, bizarrerie, froideur, anergie...) d'installation progressive.
- Débordements comportementaux (sensibilité interpersonnelle, excentricité, impulsivité...).
- Anomalies neuropsychologiques ou neurophysiologiques comme l'anomalie de la composante extra-rétinienne de la poursuite oculaire ou l'anomalie de l'onde P50...
- Particularités en neuro-imagerie cérébrale.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature