I L y a plus d'un siècle, Cesare Lombroso, fondateur de la criminologie scientifique, pensait repérer les criminels à partir des stigmates anatomiques comme les déformations du crâne. On n'en est plus là, mais les chercheurs n'ont pas renoncé à trouver un substrat physiologique au crime et utilisent les moyens technologiques les plus modernes pour fouiller le cerveau. Alison Abbott fait le point dans « Nature » de cette semaine sur les recherches en cours.
La réponse peut-elle venir des techniques d'imagerie ? Certains le croient et misent sur l'IRM (imagerie à résonance magnétique) fonctionnelle pour identifier les zones du cerveau qui fonctionneraient différemment chez les psychopathes et chez les personnes dites normales. Des travaux dans la lignée de ceux du neurologue américain Antonio Damasio (auteur de « l'Erreur de Descartes », publié chez Odile Jacob en 1995), qui a montré, par exemple, que des patients ayant eu des lésions du cortex orbitofrontal avaient des problèmes de comportement et pouvaient être très agressifs. Adrian Raine (université de Californie du sud) a ainsi mis en évidence, grâce à l'IRM, une réduction du volume du cortex préfrontal chez des psychopathes ayant commis des crimes violents (21 sujets comparés à des volontaires normaux). Une autre école, celle du Britannique James Blair, estime que la zone sensible se trouve plutôt du côté de l'amygdale : cette zone s'active chez des volontaires normaux confrontés à la tristesse ou la colère d'autres personnes et - hypothèse - fonctionnerait mal chez les psychopathes, d'où leur manque de peur et d'empathie.
Ces études neurophysiologiques sont encore balbutiantes. D'une part, parce qu'il est difficile de trouver des sujets qui soient des psychopathes authentifiés et non par exemple des auteurs de crimes passionnels. Ensuite parce que les chercheurs ont peur de répéter les erreurs de Lombroso, d'autant que l'interprétation des données de l'IRM est toujours audacieuse. Enfin parce que les fonds manquent pour ce type de recherches sur « la face sombre de la nature humaine », selon les termes du psychologue canadien Robert Hare, qui a mis au point un test pour identifier les psychopathes.
Tous obstacles qui n'empêchent pas certains de rêver, de façon peut-être dangereuse, à une science qui viendrait au secours de la justice.
* « Nature », vol. 410, 15 mars.
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