C' EST à la demande de la Conférence nationale de santé qui se réunit cette année à Strasbourg les 27, 28 et 29 mars que le Haut Comité de la santé publique (HCSP) a poursuivi sa réflexion sur « le panier de biens et services de santé » commencée l'année dernière (« le Quotidien » du 18 février 2000). Dans son rapport préparatoire aux travaux de la conférence, il juge urgent de redéfinir le contenu de ce panier de soins et de fonder son remboursement par l'assurance-maladie sur le service médical rendu, comme c'est déjà le cas pour le médicament.
Deux raisons motivent, selon le Haut Comité de santé publique, l'urgence qu'il y a désormais à redéfinir les critères qui motivent la prise en charge par l'assurance-maladie obligatoire des produits, actes et prestations de soins. La première est que, face à une augmentation quasi constante de la demande de soins et à une enveloppe budgétaire forcément limitée, les pouvoirs publics devront faire des choix et s'assurer que l'argent est utilisé à bon escient. Par ailleurs, dans ce contexte, clarifier le contenu de ce panier de soins ainsi que les règles qui régissent ce qui entre dans le panier et ce qui en sort est, selon lui, la seule façon d'assurer l'égalité d'accès à des soins de qualité.
Dans son précédent rapport, le HCSP partait du principe que le panier de biens et services ne doit comprendre « que ce qui est utile et nécessaire ». Il va cette fois plus loin en suggérant que le remboursement par l'assurance-maladie soit fondé sur l'évaluation du service médical rendu.
« La notion de service médical rendu apparaît clairement en France dans les mécanismes de choix des médicaments remboursés et pourrait s'étendre à d'autres composantes du panier de biens et services », explique le rapport, qui reconnaît que l'évaluation des actes médicaux est cependant moins aisée et « n'est mesurable que pour des pathologies bien définies, dans un contexte de filières de soins, et si le respect des bonnes pratiques peut être assuré ».
Un changement complet de logique
Une démarche complexe puisqu'il ne s'agit pas simplement d'exclure certains actes ou prestations du remboursement, mais « d'éliminer du panier de biens et services ce qui est non nécessaire pour un malade donné à un moment de sa maladie, sur la base de recommandations pratiques cliniques issues de conférences de consensus », un peu à l'image de ce qui s'est fait pour les RMO. Il propose donc un changement complet de logique en substituant à une simple opération de comptabilité des actes et produits remboursés une démarche de prise en charge financière d'une pathologie ou d'un risque.
Dans ce cadre, le Haut Comité insiste une fois de plus pour que soient incluses dans le panier de soins toutes les actions de prévention, « qui doivent être totalement assurées par la collectivité et bénéficier du tiers payant », comme c'est le cas actuellement pour les campagnes expérimentales de dépistage radiologique des cancers du sein. Mais confier la prévention aux professionnels de santé qui assurent les soins implique de prévoir une nomenclature spécifique et donc une rémunération spécifique, insiste le rapport, citant l'exemple de l'éducation du fumeur à laquelle pourrait être affectée une lettre clé.
Réduire le ticket modérateur
Une fois ce panier de biens et services défini, il reste le problème du ticket modérateur, c'est-à-dire de ce qui doit rester à la charge de l'assuré. Le Haut Comité de la santé publique, l'année dernière, avait longuement passé en revue les inconvénients de cet instrument, créé à l'origine pour sensibiliser les assurés au coût des soins, mais qui a conduit, au fil des ans, à un désengagement partiel de l'assurance-maladie et qui est devenu un facteur d'inégalités croissantes.
Selon le rapport, l'assurance-maladie ne prend plus en charge globalement que 73 % de la dépense nationale de santé et fait de la France l'un des pays de l'Union européenne dans lequel la part laissée à la charge de l'assuré est la plus lourde. Une situation d'autant plus anormale pour les rapporteurs « qu'aucune légitimité thérapeutique ne fonde le taux de remboursement des services proposés, sauf pour les maladies bénéficiant de l'exonération du ticket modérateur ». Le Haut Comité de la santé publique est cependant revenu sur sa proposition exprimée dans le précédent rapport qui était de le supprimer purement et simplement. Il se contente de recommander, cette fois, sa réduction pour les soins inclus dans le panier de biens et services et surtout une diminution de l'écart qui existe aujourd'hui dans le taux de remboursement entre les soins ambulatoires et l'hospitalisation.
Si le rapport confirme que les assurances complémentaires ont bien leur rôle à jouer dans la gestion de ce panier de soins, elles doivent, selon lui, être soumises à un certain nombre de règles. « On doit pouvoir concevoir que la couverture de certains risques ou soins non pris en charge par le panier puisse être laissée à la liberté de l'assuré, qui peut alors s'adresser aux services d'une assurance complémentaire, mais que précisément tout ce qui correspond aux besoins jugés essentiels de prise en charge relève du domaine d'une gestion coordonnée entre assurance obligatoire et complémentaire dans le respect des règles éthiques et déontologiques », poursuit le Haut Comité, pour qui la mise en place de la CMU peut dans ce domaine servir d'exemple.
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