Zéro reste à charge ? Le gouvernement « survend » le 100 % Santé, selon un leader mutualiste

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Publié le 19/11/2018
reste a charge

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Crédit photo : PHANIE

La Mutualité Française reste toujours aussi prudente quant à l’impact réel de la réforme du reste à charge zéro (ou 100 % santé) pour les assurés.

Sur le papier, cette réforme promet une prise en charge intégrale (en combinant l'intervention de la Sécu et des complémentaires santé) sur les dépenses d’optique, de soins dentaires et prothèses auditives, avec une montée en charge progressive dans les trois prochaines années. Mais pour certains responsables mutualistes (et assurantiels), la présentation d'une prise en charge des frais de santé sans reste à charge relève en partie de l'incantation et de l'illusion. 

« Ce qui me gêne dans le "RAC zéro", c’est que ce gouvernement "survend" le dispositif, ce qui risque de produire de grosses déceptions, explique à son tour Jean-Paul Benoit, président de la Mutualité Française Sud, Provence-Alpes-Côte d’Azur. Hélas, cette mesure est loin d’être un vrai 100 % santé, et ce pour plusieurs raisons. D’abord, elle ne s’adresse qu’aux personnes disposant d’une complémentaire santé et exclut donc les 4 millions de personnes qui en sont dépourvues. »

Autre bémol, le champ même de la réforme : « Le dispositif qui prendra effet en 2020 et 2021 au mieux, ne concerne que l’optique, le dentaire et l’audioprothèse, sous réserve que les assurés sociaux choisissent les équipements éligibles, ce qui n’est qu’une petite partie de l’offre, détaille le leader mutualiste. Rien n’est prévu pour les implants ou la parodontologie mais rien non plus pour les consultations en honoraires libres ou les frais hospitaliers qui génèrent des restes à charge. »

Effet prix

Plus grave enfin, les cotisations ne peuvent qu'augmenter sous l'effet de transferts de charges, même si le gouvernement s'en défend. « Faire croire qu’avec le RAC zéro, il n'y aura plus rien à payer, c’est faux ! Cela va faire augmenter les cotisations des complémentaires santé », assure Jean-Paul Benoit, également vice-président de la FNMF. Il réclame au passage la suppression des taxes sur les contrats complémentaires, qui pèsent à plus de 14 %...

Cette mise au point d'un haut responsable mutualiste intervient après d'autres discours similaires, Agnès Buzyn devant s'expliquer régulièrement sur le risque de renchérissement des coûts avec la réforme 100 % santé.  

Sur ce sujet sensible, la Mutualité juge officiellement qu'il est trop tôt pour mesurer précisément le coût de cette réforme pour les complémentaires car il dépendra du taux de recours aux différents paniers de soins du « RAC zéro ». Mais l’impact (sur les cotisations) sera plus important pour les adhérents couverts par de petits contrats, c'est-à-dire ceux dont les garanties sont actuellement inférieures au panier de soins à reste à charge zéro, a prévenu la FNMF. La seule mise à niveau de ces contrats de base pourrait impliquer une hausse des remboursements, et donc des cotisations, de 4 à 5 %, étalée sur 3 années.

Le cabinet Mercer évalue de son côté à 4,8 % la hausse mécanique des cotisations pour les contrats « entrée de gamme », la réforme 100 % Santé ayant en revanche un impact limité sur les contrats « haut de gamme ».  

De notre correspondante Hélène Foxonet

Source : lequotidiendumedecin.fr