Douleurs

Soulager sans réserve

Publié le 13/11/2009
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La lutte contre la douleur a fait l'objet récemment de nombreuses recommandations concernant des populations aussi différentes que les enfants, les personnes polyhandicapées et les sujets âgés. Cette lutte doit être désormais menée sans réserve, en levant les freins à une prescription antalgique adéquate.

Crédit photo : ©BURGER/PHANIE

« Pour vacciner son fils contre la grippe, Mme S. demande à son médecin de lui prescrire une petite anesthésie locale peu avant la piqure. Lors du dernier vaccin, il a fallu l'immobiliser pour réussir à le piquer... »

La tentation de sous-doser

Liée à l'histoire de la médecine où le traitement de la douleur était autrefois négligé, la tentation de sous-doser les traitements antalgiques existe encore chez certains praticiens ou dans certains services. Le spectre de la toxicomanie aux opiacés qui a longtemps rendu les médecins prudents dans leurs prescriptions s’est pourtant bien éloigné... Il y a aujourd'hui consensus* pour soulager sans réserve en respectant une progressivité dans le niveau d'antalgie : niveau 1 (paracétamol, anti-inflammatoires), niveau 2 (codéine, tramadol, dextropropoxyphène et associations avec paracétamol) puis niveau 3 (opioïdes forts), qu'il ne faut hésiter à prescrire à doses élevées si nécessaire. La nature du traitement de la douleur est liée aussi à l'étiologie (douleurs neuropathiques, dépression sous-jacente...).

Des douleurs à évaluer

L'évaluation est le préalable à la prescription antalgique. Dans le cas des douleurs chroniques, il est toujours utile de prendre le temps de les évaluer à l'aide d'une réglette avec une échelle de 1 à 10, par exemple, pour une mesure initiale et comparer les résultats mois après mois. « Les échelles de douleurs ont aussi pour intérêt de parler de ces douleurs sans lassitude » fait remarquer le Dr Marie-Anne Puel, généraliste enseignante et membre de la Société Médicale Balint (SMB)*. Ce mode a aussi l'intérêt de déjouer la tentation pour le médecin de minimiser la douleur de son patient si elle est rebelle à toute tentative de traitement (30 % des douleurs) et le met en échec.

L'examen clinique comme outil thérapeutique

Au delà de l'évaluation, l'examen clinique régulier est un autre moyen de prendre en charge la douleur chronique en montrant au patient qu'on s'intéresse à l'étiologie de sa douleur ou en le rassurant sur l'absence de survenue de nouvelles pathologies. Le toucher, en particulier, offre le bénéfice d’une réassurance qui peut être antalgique en elle-même par le biais de l'effet placebo, plus actif contre la douleur que pour d'autres symptômes (50% versus 30%). Enfin, avec des douleurs au long cours, un état dépressif peut survenir. Or cet état dépressif peut majorer le vécu douloureux qui, à son tour, aggrave la dépression. Au delà d'un traitement antalgique adéquat, le traitement de ce fond dépressif a souvent un impact positif sur le ressenti de la douleur elle-même.

 

* Prise en charge de la douleur chez l'adulte, recommandations Réseau Douleur Franche Comté (RDFC), novembre 2006

Dr Jean-Pierre Rageau

Source : lequotidiendumedecin.fr