Mme R, 77 ans, souffre depuis deux mois d’une fracture-tassement importante de L4 confirmée par les radiographies et l’IRM. L’ostéodensitométrie retrouve un T-score inférieur à -4 (rachis, col du fémur, avant bras). La patiente se plaint de douleurs ne cédant pas au paracétamol (3 g/jour), avec irradiation dans l’une et l’autre jambe de façon aléatoire. Le bilan biologique est normal (NFS, VS, électrophorèse des protéines, calcémie, calciurie, vitamine D, marqueurs de la résorption osseuse, TSH). Les premières fractures (cheville, poignet), puis vertébrales spontanées sont survenues environ 5 ans après l’arrêt du THS prescrit vers la cinquantaine, soit vers 65-66 ans. Dans ses antécédents, on retrouve une hernie hiatale et un méga-œsophage, ainsi qu’une dépression traitée depuis 3 ans par antidépresseurs de type IRS. La patiente refuse tout traitement hormis calcium et vitamine D.
Comment analyser cette observation ?
Il s’agit d’une femme de 77 ans pour laquelle le risque fracturaire concerne le rachis et l’extrémité supérieure du fémur (FESF). A cet âge, le traitement anti-ostéoporotique doit avoir une efficacité sur les deux types de fractures.
La fracture actuelle siège au niveau d’une vertèbre lombaire mais il y a des antécédents de fractures vertébrales et périphériques. La densité osseuse est extrêmement basse à tous les sites, bien en deçà du seuil de -2.5 en T-score définissant l’ostéoporose.
Les douleurs évoluent depuis 2 mois, mais seuls des antalgiques de niveau 1 sont pris, et l’observation ne dit pas si le repos au lit est correctement observé ou si une orthèse de maintien a été confectionnée.
Il existe une irradiation à bascule dans les membres inférieurs.
Le bilan biologique est normal.
Le traitement actuel de l’ostéoporose se résume à une supplémentation en calcium et vitamine D, indispensable mais pas suffisante dans ce contexte de sévérité.
Les antécédents sont importants pour le choix du traitement.
Comment soulager les douleurs de cette patiente ?
--› La première étape du traitement est l’obtention rapide d’une antalgie correcte. Le paracétamol a l’avantage d’une excellente tolérance mais il s’avère souvent insuffisant dans ce contexte hyperalgique. On peut y adjoindre un antalgique de niveau 2, comme le tramadol. Des posologies faibles, de l’ordre de 50 mg LP une à deux fois par jour, concilient antalgie et tolérance satisfaisantes. La morphine peut être associée au tramadol et au paracétamol, à doses faibles (5 mg), à libération immédiate, en prévision des accès douloureux positionnels.
--› Le repos strict au lit à domicile est indispensable. Une héparinothérapie préventive est systématique, ainsi qu’un entretien articulaire et musculaire des membres inférieurs (1).
Une orthèse du tronc est très utile pour envisager une reverticalisation progressive en limitant les phénomènes douloureux.
--› L’alternative à ce traitement est la vertébroplastie. Il s’agit d’injecter, sous contrôle radio, du ciment liquide dans la vertèbre fracturée. Le ciment durcit dans la vertèbre, lors d’une réaction exothermique, laquelle explique l’antalgie rapide. Des fuites de ciment, peu prévisibles, sont parfois responsables de radiculalgies. Chez cette patiente, les douleurs des membres inférieurs n’incitent pas à la réalisation d’une vertébroplastie (2).
Comment prévenir la récidive fracturaire ?
--› La supplémentation en calcium et vitamine D est presque toujours indispensable. Un apport de 1 g de calcium et de 800 UI de vitamine D est conseillé.
--› Le choix du traitement anti-ostéoporotique est dicté essentiellement par l’âge de la patiente, ses antécédents et ses souhaits.
Vus l’âge et le risque ultérieur de FESF, deux molécules ne pourront pas être proposées : l’ibandronate et le raloxifène. En effet, aucune efficacité significative dans la prévention FESF n’a pu être démontrée dans les deux cas (3).
Le ranélate de strontium expose rarement au risque de DRESS syndrome (Drug Rash with Eosinophila and Systemic Symptoms, correspondant à un syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse) ; c’est surtout la forme orale quotidienne qui risque d’être refusée par la patiente (4).
Les bisphosphonates oraux, comme le risédronate ou l’alendronate sont contre-indiqués en cas de reflux gastro-oesophagien et leur acceptation est ici improbable.
Le tériparatide peut être envisagé, étant donnée la présence de plusieurs fractures vertébrales, mais chez cette patiente qui refuse les traitements il paraît difficile de lui proposer une injection quotidienne sous-cutanée pendant 18 mois.
Le traitement le plus indiqué ici est le zolédronate en perfusion annuelle. Il faut vérifier fonction rénale et hydratation avant la perfusion. Le risque d’ostéonécrose de la mâchoire est plus rare lors du traitement de l’ostéoporose que chez les patients cancéreux. Un contrôle de l’état dentaire est recommandé avant le début du traitement et les traitements agressifs en bouche (extraction) sont ensuite contre-indiqués (5).
En résumé, la prise en charge de cette patiente devra privilégier d’abord l’antalgie puis la prévention des récidives fracturaires par l’association calcium – vitamine D et zolédronate.
Etude et Pratique
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