Retard de paiement, manque d'accompagnement des tutelles sanitaires, problème de zonage… Le contrat d'engagement de service public (CESP) ne fait pas l'unanimité dans le cœur des futurs médecins, qui en ont critiqué le fond autant que la forme vendredi dernier, à Tours, au 20e congrès de l'Intersyndicale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG).
Créé en 2010, le CESP vise à lutter contre la désertification médicale, en offrant une allocation de 1 200 euros bruts par mois aux étudiants et internes à partir de la 2e année d'étude, contre l'engagement à exercer dans une zone sous-dotée pendant une durée équivalente à la durée de versement de l'allocation. En 2017-2018, 549 nouveaux jeunes ont été séduits par ce système, ce qui porte à 2 300 le nombre de contrats signés au total.
L'ISNAR-IMG et l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) ont mené l'enquête* sur le degré d'appréciation du dispositif. Et les résultats, présentés au congrès, sont mitigés. Plus de 50 % des étudiants et internes signataires d'un CESP déplorent un manque d'accompagnement au cours de leur parcours. Une aberration pour le syndicat. « L'étudiant est censé bénéficier d'un accompagnement personnalisé par un référent de l'agence régionale de santé spécialisé dans le CESP, souligne Nolwenn Bouchet, chargée de mission réseau à l'ISNAR-IMG et responsable de l'étude. L'étudiant prend contact avec le référent au moment de la signature du contrat, puis au moment de s'installer mais entre les deux, il est seul ! » « L'accompagnement est quasi inexistant alors que le CESP a été pensé pour ça, c'est son atout », enchérit Lucie Garcin, présidente de l'ISNAR-IMG.
D'autres difficultés de terrain percent. Un tiers d'entre eux (32 %) ont perçu leur allocation avec du retard. Les évolutions de la cartographie des zones sous-denses ont également influencé les projets professionnels des jeunes. « Les zones éligibles ont évolué entre le moment de la signature et l'installation, détaille Sandra Imbs, trésorière de l'association de moyens de l'ISNAR-IMG. Dans la moitié des cas, les signatures de contrat s'effectuaient sur un zonage non actualisé. La moitié des participants n'ont pas été informés de changements. »
Conséquences financières
Si le lieu du projet d'installation initial ne correspond plus à la nouvelle cartographie, aucune autre option n'est proposée par l'ARS, obligeant une partie des jeunes à rompre leur contrat. C'est le cas de 5 % des jeunes interrogés. Pourtant, quatre sur cinq étaient prêts à revoir leur lieu et projet d'installation, révèle l'enquête.
Hormis le problème de zonage, l'inadéquation entre les postes d'internes disponibles à l'ECNi et le projet formulé au moment de la signature du CESP ainsi que la modification complète du projet professionnel sont les deux autres motifs de rupture de contrat avancés par les jeunes.
Les conséquences financières d'une résiliation peuvent être extrêmement lourdes pour l'interne. Avant l’obtention du diplôme d’études spécialisées, le jeune médecin sur le départ doit s'acquitter d'une pénalité de 200 euros par mois de perception de l’allocation (avec un minimum de 2 000 euros, soit 10 mois de pénalités). Après l’obtention du diplôme d’études spécialisées, cette pénalité s’élève à 20 000 euros. Mais elle n’est pas due par le signataire lorsque sa demande de résiliation est liée au fait que son projet professionnel – stable depuis trois ans – s’est trouvé bouleversé par une modification par l’agence régionale de santé des zones dans lesquelles des lieux d’exercice peuvent être proposés aux signataires.
* Sondage réalisé auprès de 202 répondants (étudiants du 2e cycle et du 3e cycle) via un questionnaire en ligne envoyé entre mi-août et mi-novembre 2018.
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