Ils n’en peuvent plus d’attendre. Remontés à bloc contre un gouvernement qui, selon eux, ne tient pas ses engagements, les syndicats de praticiens hospitaliers appellent en choeur à une grève illimitée de la permanence des soins (PDSES) à compter du 1er mai pour revaloriser les astreintes sans délai.
« Nos organisations syndicales constatent que la permanence des soins réalisée à domicile par les praticiens ainsi que les déplacements liés aux astreintes n’ont toujours pas été revalorisés malgré les engagements du gouvernement », soulèvent les représentants du Snam-HP, de l’INPH, de Jeunes Médecins, de la CPH, d’APH, d’Avenir hospitalier, de la CMH et de l’Amuf, dans un communiqué commun.
Des textes jamais parus
Pourtant, rappellent les signataires, des « financements dédiés » ont bien été alloués et votés dans les budgets de la Sécu pour 2024 et 2025. « Depuis trois ans, ce sujet de la revalorisation des astreintes est méticuleusement évité par les ministres qui se succèdent alors que des arbitrages ministériels ont validé le principe de mesures transitoires pour que ces astreintes soient revalorisées, dans l’attente de la publication des textes devant pérenniser cette mesure », pointent les intersyndicales.
« On avait travaillé sur ces astreintes avec la DGOS (direction générale de l’offre de soins, NDLR), un projet d’arrêté avait été établi pour les revaloriser à partir du 1er juillet 2024 mais le texte n’est jamais paru », s’agace la Dr Anne Geffroy-Wernet, présidente du Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs, élargi aux autres spécialités (Snphare). Et c’est sans compter les engagements d’Aurélien Rousseau, avant qu’il démissionne du ministère de la Santé en décembre 2023 : « Il avait promis des mesures transitoires pour faire la jonction entre le 1er janvier et le 1er juillet 2024, mais elles n’ont jamais eu lieu non plus », soupire l’anesthésiste.
Revalorisation prévue en novembre 2025 ?
« À force de refiler la patate chaude, elle finit par refroidir », ironise le Dr Sadek Beloucif, président du Snam-HP, lassé par la valse des ministres à Ségur. Une instabilité qui a sans cesse repoussé les arbitrages avant la parution des textes d’application des revalorisations des astreintes au Journal officiel.
Pourtant, d’après un document de travail présenté par la DGOS aux organisations syndicales de PH lors d’une réunion le 9 avril, que le Quotidien s’est procuré, la réforme des astreintes médicales devrait finalement entrer en vigueur le 1er novembre 2025. « La publication des textes est prévue au printemps afin de laisser le temps nécessaire aux travaux préparatoires des établissements, des GHT et des ARS », est-il précisé.
Mais pas de quoi satisfaire les syndicats de PH. « On nous annonce maintenant les revalorisations des astreintes pour novembre, mais nous ne sommes pas responsables de l’instabilité politique, peste la Dr Rachel Bocher, présidente de l’INPH. L’hôpital a toujours été là, avant le Covid, pendant et après la pandémie ! Une enveloppe avait été bloquée pour ces revalorisations et on aimerait bien savoir où elle est passée. »
On a l’impression de faire la manche !
Dr Anne Geffroy-Wernet, présidente du Snphare
Pas question donc d’attendre plus longtemps pour revaloriser les astreintes, dont les montants sont si bas, aux yeux des praticiens hospitaliers, que les syndicats les comparent volontiers aux « tarifs d’une baby-sitter ».
La fourchette de rémunération d’une astreinte de 14 heures s’étend en effet de 43,86 euros brut pour le forfait de base jusqu’à 199,56 euros brut pour le forfait maximal incluant les déplacements. Soit, au mieux, 14,25 euros bruts de l’heure… « On a l’impression de faire la manche ! s’indigne la Dr Anne Geffroy-Wernet. La permanence des soins et les niveaux de rémunération sont les principales raisons qui font fuir les PH des hôpitaux. »
Négociations immédiates
À ce stade, la réforme du gouvernement prévoit une généralisation de la forfaitisation des astreintes à l’horizon 2026, laissant la main aux établissements pour définir différents niveaux de tarifs, dans la limite des seuils minimum et maximum préalablement définis. « Un arrêté devrait fixer un plancher à 70 euros et un plafond à 280 euros », précise la présidente du Snphare. Ce syndicat a proposé un score destiné à aider les hôpitaux à définir le niveau de rémunération des astreintes de leurs PH, en fonction de la récurrence et de la nature du travail réalisé pendant ces astreintes (appels, avis, déplacements, etc).
Mais refusant d’attendre plus longtemps, les intersyndicales de médecins hospitaliers exigent « l’ouverture immédiate de négociations » incluant une majoration immédiate et rétroactive à partir du 1er janvier 2024 de 100 % des forfaits, émoluments et déplacements liés aux astreintes pour l’ensemble des praticiens hospitaliers et des internes.
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