« La santé n'a pas de prix », jurait Emmanuel Macron le 12 mars, quelques jours avant de décréter un premier confinement généralisé pour faire face au choc du Covid-19. Cette fameuse politique du « quoi qu'il en coûte », l'hôpital a été le premier à en bénéficier, au terme de la première vague épidémique.
Dès la mi-juillet, trois accords salariaux sont signés entre le gouvernement et les organisations syndicales hospitalières – personnels de la fonction publique hospitalière d'une part et médecins d'autre part –, les internes et les étudiants. Au total, plus de 8 milliards d'euros par an (7,6 milliards pour les paramédicaux, 450 millions pour les médecins et 200 millions pour les internes et les étudiants) sont débloqués au profit de deux millions de personnes dans les établissements de santé et en EHPAD.
Au menu : revalorisations et primes pour les paramédicaux, révision de la grille et hausse de l'indemnité de service public exclusif (IESPE) pour les praticiens hospitaliers (PH) et majoration des émoluments de base pour les internes et les étudiants. Ces accords, qualifiés « d'historiques » par Matignon sont arrachés après sept semaines de négociations menées tambour battant par le ministère de la Santé.
Partisans d'un Ségur 2
Mais à l'hôpital public, traversé par un mouvement social depuis plus d'un an, le Ségur ne fait pas taire les mécontentements. Jugeant les revalorisations insuffisantes, les syndicats non-signataires accompagnés des collectifs inter-urgences (CIU) et inter-hôpitaux (CIH) maintiennent la pression dans la rue. D'abord pendant les négociations, puis en octobre lors d'une manifestation qui conduit le gouvernement à avancer de plusieurs mois le versement de la deuxième tranche de revalorisations.
À l'automne, le CIH affiche clairement son amertume lors des discussions et du vote du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 qui acte les revalorisations du Ségur. Les revendications centrales restent insatisfaites : arrêt total des fermetures de lits, recrutements massifs et augmentations généralisées de 300 euros net mensuels.
Chez les syndicats de PH, le courant ne passe plus entre signataires et non-signataires des accords du Ségur. Alors que les premiers saluent la refonte de la grille de rémunération des praticiens − suppression des trois premiers échelons et création de trois nouveaux mieux rémunérés en fin de carrière −, les seconds crient à « l'arnaque » et appellent leur base à contester les arrêtés de reclassement.
Autre symbole du malaise, le collectif Santé en danger, créé en août par le Dr Arnaud Chiche, anesthésiste et réanimateur médical à la polyclinique d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), réclame un Ségur 2 après la « déception » du premier. Mais pour Olivier Véran « la partie est terminée », comme il l'annonce dans nos colonnes en septembre.
Une PPL contestée
Au-delà de l'application des accords salariaux, le gouvernement peine à concrétiser les autres chantiers du Ségur. À l'automne, le PLFSS alloue une enveloppe de 19 milliards d'euros pour l'investissement hospitalier (dont 13 milliards de reprise de dette) et met en place l'expérimentation d'un modèle de financement des activités de médecine dit « populationnel », alternatif à la tarification à l'activité (T2A).
Début décembre, c'est par le biais d'une proposition de loi spécifique que la majorité s'emploie à concrétiser le volet non salarial du Ségur. Malgré le recul sur la création d'une nouvelle profession médicale intermédiaire (entre l'infirmière et le médecin) ou sur la direction commune des groupements hospitaliers de territoire (GHT), le texte porté par le Dr Stéphanie Rist (LREM) élargit les compétences des sages-femmes, replace le service au centre de l'organisation hospitalière et durcit la lutte contre l'intérim médical.
Malgré tout, la Fédération hospitalière de France (FHF), qui avait pourtant salué les accords salariaux, s'impatiente. « L'hôpital a besoin en urgence d'une réforme de fond ! », recadre début décembre son président Frédéric Valletoux. Il attend toujours une « remise à plat de l'ONDAM » ou la réorganisation locale des agences régionales de santé (ARS). Pour le maire de Fontainebleau, « les accords du Ségur étaient un moment fort mais il ne faut pas perdre de vue tout le reste ».
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