Diriger un hôpital – et a fortiori le premier CHU de France – ne s'improvise pas, Mireille Faugère en sait quelque chose. Quatre ans après son débarquement par Marisol Touraine de l'Assistance publique – Hôpitaux de Paris (pour sa gestion du dossier sensible de l'Hôtel-Dieu), l'ancienne directrice générale du CHU parisien est revenue sur la délicate affaire du management hospitalier et de l'organisation du travail au sein d'un établissement de santé, dans le cadre d'une table ronde ad hoc organisé à Paris.
À bien des égards, l'hôpital diffère d'une entreprise lambda, explique Mireille Faugère, ancienne haute responsable de la SNCF, aujourd'hui à la Cour des comptes. Le manque de « vision transversale » entre les différents corps de métiers ne lui a pas laissé de bons souvenirs. « À l'hôpital, personne n'est vraiment en charge de tout le processus [de production de soins, NDLR]. Le patient est finalement le seul à tout voir de bout en bout. Et c'est lui qui va le plus souffrir des ruptures dues au cloisonnement. » La distinction sémantique entre le « personnel médical » et « non-médical », cette « terrible désignation », contribuent aussi à structurer l'hôpital en silos.
Gouvernance partagée
En matière d'exercice du pouvoir, le prédécesseur de Martin Hirsch a également constaté, souvent à ses dépens, une caractéristique forte du monde hospitalier qui complique la tâche des managers : l'existence d'un véritable « État dans l'État » avec le corps médical, qui oblige à composer. Selon Mireille Faugère, « le directeur général n'a aucun levier hiérarchique sur ceux qui font la production, dont le vrai directeur est celui de l'université, surtout pour les PU-PH ». Cette gouvernance partagée peut être « une difficulté ou une richesse », juge l'ancienne directrice sans pour autant préciser la fin de son propos.
L'erreur d'un médecin ou d'un soignant est une situation particulièrement problématique à gérer à l'hôpital. Alors que l'industriel produit les boîtes de conserve dans le secret de son usine, à l'abri du regard du client, le médecin « fabrique son service » devant le patient et sa famille, « témoins d'un service fluide ou grippé », explique sans fard l'ancienne patronne de l'AP-HP. « S'ils ont un retour direct sur leur art, s'ils connaissent un échec, alors les professionnels de santé peuvent devenir extrêmement agressifs et en vouloir à leur hiérarchie », souligne Mireille Faugère.
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