Dans le prolongement des conclusions du Ségur de la santé, la réforme de la gouvernance hospitalière avance à petit pas et non sans frictions. Qu'il s'agisse des réunions de travail organisées au ministère sur les groupements hospitaliers de territoire (GHT) ou des débats au Parlement sur la proposition de loi (PPL) de la majorité visant à « améliorer le système de santé par la confiance et la simplification », les pistes mises sur la table divisent le microcosme hospitalier.
Commission médicale de groupement
À la mi-février, le gouvernement a finalisé près de trois ans de travaux sur la stratégie et la gouvernance des GHT prévus par la loi Buzyn de 2019. Plusieurs ordonnances et décrets devraient être présentés au Conseil d'État dans les semaines à venir. Il est ainsi prévu la création, dans chaque GHT, d'une commission médicale de groupement (CMG) qui contribuerait à « l'élaboration de la politique d'amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que des conditions d'accueil et de prise en charge des usagers », selon le document de travail que s'est procuré Hospimedia. Elle aurait aussi pour rôle d'appliquer le projet médical partagé (PMP) après approbation du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS).
Le ministère prévoit en outre de créer une direction des affaires médicales mutualisée au sein du GHT. L'établissement support verrait ses fonctions en matière de ressources humaines renforcées : gestion prospective des besoins, mise en œuvre du développement professionnel continu (DPC) et du schéma territorial de la permanence des soins notamment. Sur tous ces points, la CMG sera force de proposition avec la création d'une « sous-commission chargée des ressources humaines médicales et des parcours professionnels ». Dans ce cas de figure, les commissions médicales d'établissement (CME) pourront déléguer si elles le souhaitent des compétences à la CMG. Et leur projet d'établissement devra être « en cohérence » avec celui du groupement.
Super CME ?
Pour aller plus loin dans la mutualisation de la gouvernance au sein des GHT, un droit d'option est envisagé pour permettre la création d'une commission médicale unifiée de groupement (CMUG). Celle-ci interviendrait sur demande du directeur de l'établissement support à l'ARS en accord avec les CME des différents hôpitaux. Elle se substituerait à la CMG et aux CME existantes. La CMUG regrouperait des représentants des chefs de pôles, des responsables de services, des praticiens (titulaires et contractuels), des sages-femmes, des internes, des étudiants et des enseignants si un CHU appartient au groupement. Son président serait également vice-président des directoires des établissements.
Dans un communiqué publié aussitôt après la dernière réunion de travail, les conférences de présidents de commissions médicales d'établissement (CME) de CHU, de centres hospitaliers (CH) et de centres hospitaliers spécialisés (CHS) ont dit adhérer « sans réserve à ces objectifs ». Elles se félicitent de la naissance des CMG. « La stratégie est définie à l'échelle du groupement. Les établissements parties ont ensuite la liberté de s'organiser dans ce cadre pour la mettre en œuvre ou porter des initiatives », résument les trois organisations. Elles insistent toutefois sur la nécessité de laisser une vraie marge de manœuvre aux établissements. « La CMG se centre sur un certain nombre d'objectifs ou de filières sans prendre en compte toutes les activités des établissements parties », réclament-elles citant particulièrement « les ressources humaines et l'investissement ».
À l’inverse, le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes réanimateurs élargi (SNPHARe) ne voit dans ces mesures qu'un « étage additionnel dans la chaîne hiérarchique » issue de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) de 2009.
Néolibéralisme
Au Parlement cette fois, la PPL de la députée du Loiret Stéphanie Rist (LREM) porte, elle aussi, plusieurs avancées en matière de gouvernance à l'hôpital. Mais si la réhabilitation du service comme « échelon de référence » semble faire l'unanimité, d'autres points laissent à désirer. Le collectif inter-hôpitaux (CIH) s'émeut du manque « démocratisation » du texte. Et d'énumérer le « manque des paramédicaux et usagers dans la gouvernance, le recul des cadres à l'échelle du service, l'absence de ces derniers dans les organisations stratégiques ».
Un constat partagé par le SNPHARe. « C'est à nouveau la confiscation de la démocratie sanitaire au profit des quelques personnalités désignées pour siéger dans des instances car éclairées et formées en quelques heures au management. Les autres, soignants, patients, familles ne sont pas conviés, a priori incapables de contribuer positivement à une réflexion sur l'hôpital public. Un nouvel acte du néolibéralisme en marche », considère le syndicat.
Les conférences nationales des directeurs généraux de CHU et de CH ont exprimé de ler côté leur « très vive inquiétude » quant au principe de l'élection des présidents des commissions de soins infirmiers, de rééducation et médicotechniques (CSIRMT). Les conférences voient dans cette mesure l'introduction des « enjeux de la représentation politique et syndicale » au sein de la CSIRMT alors que celles-ci devraient y échapper pour accomplir au mieux leur rôle d'acteur de « la politique générale de l'établissement » et de « préparation du projet de soin et au suivi de sa mise en œuvre ».
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