Un Ségur ne fait pas tout. Pour sa conférence de presse de rentrée, la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés solidaires (FEHAP, le privé non lucratif) a insisté sur le défi considérable de l'attractivité des métiers, une « urgence absolue » pour les secteurs du soin comme de l'accompagnement . « Alors que la crise se prolonge, que nous sommes mobilisés face à la quatrième vague, il existe de vraies tensions sur nos ressources humaines », a résumé Marie-Sophie Desaulle, présidente de la Fédération, estimant que « le secteur santé au sens large reste peu attractif et n'attire pas ».
Discriminations et trous dans la raquette
La FEHAP traîne plusieurs boulets aux pieds qui compliquent le recrutement et la fidélisation de forces vives au sein des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux. Les métiers et les carrières ? Avec le Ségur, « il y a certes eu des revalorisations salariales, un engagement sans précédent mais ça n'a pas donné le déclic », déplore Marie-Sophie Desaulle. En effet, au différentiel salarial européen s'ajoute, au détriment du secteur privé non lucratif, des « iniquités de traitement » avec le secteur public et des « trous dans la raquette ». Ces écarts ou ces oublis concernent principalement les personnels du médico-social (EHPAD) et du social.
De surcroît, la FEHAP a fait ses calculs et les résultats ne sont pas bons. Les enveloppes octroyées au privé non lucratif (Ségur 1 sur les revalorisations salariales des soignants, Ségur 2 sur les grilles de carrière) sont jugées insuffisantes pour couvrir les engagements pris par le gouvernement. Il manque 10 millions d'euros sur le Ségur 1, illustre Antoine Perrin, directeur général de la Fédération. Par ailleurs, selon nos informations, quelque 7 100 praticiens du privé non lucratif hériteront bien d'une prime post-Ségur (75 % en fixe, 25 % en variable) mais « moindre » que celle accordée à leurs confrères du public, confie le délégué général.
La FEHAP évalue, par ailleurs, le besoin de financement à 58,5 millions d'euros pour assurer la revalorisation des 10 900 emplois temps plein (ETP) identifiés au sein des centres de dépistage des cancers, centres de santé, sièges ou encore de médecins coordonnateurs du médico-social (exclus, eux, des revalorisations).
La situation est également compliquée pour les professionnels de l'accompagnement où le besoin de financement spécifique est estimé à 370 millions d'euros pour le secteur privé solidaire. Ce budget permettrait d'aligner les rémunérations pour les 60 000 ETP financés par l'Assurance-maladie. Autant d'« oubliés » qui nourrissent un sentiment profond d'injustice, plus d'un an après les accords du Ségur.
Dans ce contexte fragile, la mise en place de l'obligation vaccinale pour tous les soignants (à compter du 15 septembre pour la première dose) est une « inquiétude » supplémentaire. Selon une enquête menée par la FEHAP auprès de ses adhérents, les établissements de santé (et du handicap) font état d'un delta de 5 % à 6 % de soignants non vaccinés mais cette proportion est plus importante dans le secteur des personnes âgées. Faute de bras, certains directeurs envisagent de recourir à des contractuels ou des intérimaires, alerte Marie-Sophie Desaulle.
Discours de la méthode
Constructive, la Fédération entend défendre les spécificités du modèle privé solidaire dans toutes les réformes de financement en cours (urgences, SSR, psychiatrie, HAD). Mais la FEHAP réclame au préalable la signature d'un protocole de méthode, gage de visibililté sur ces sujets sensibles.
Elle jugera aussi sur pièces la volonté du gouvernement sur la réforme de l'autonomie mais redoute un nouveau quinquennat « sans loi ». Elle exige du moins des marqueurs forts au bénéfice des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), des auxiliaires de vie, mais aussi sur la réduction du reste à charge des familles.
Dans la perspective de la présidentielle, la FEHAP lance une consultation citoyenne, La Voix solidaire, plateforme participative dédiée à la santé. Une autre façon pour le secteur privé non lucratif de se faire entendre.
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