« Qu'est-ce que c'est beau un amphi plein ! » Même le doyen n'en croyait pas ses yeux. L'amphithéâtre Portier de la faculté de médecine de Paris Descartes était comble. Pas une seule place n'avait été laissée libre par les étudiants venus en masse.
La raison d'un tel engouement ? Pas le rattrapage du cours de biomathématiques, on s'en doute. Non, ce soir-là, derrière la paillasse étaient attendus Louise Bourgoin, Alice Belaïdi et Karim Leklou, trois des acteurs à l'affiche d'« Hippocrate », la nouvelle série signée du Dr Thomas Lilti.
Quelques semaines avant sa diffusion officielle (à partir de ce soir à 21H sur Canal +), environ 300 carabins ont eu le privilège de voir, sans même quitter les bancs de leur fac, les deux premiers épisodes des huit qui composent la première saison d'« Hippocrate ». Dans la lignée de son film éponyme, sorti en 2014, le réalisateur de « Médecin de campagne » (2016) et de « Première année » (2018) nous replonge dans les couloirs de l'hôpital. Cette fois-ci, il y met en scène des internes livrés à eux-mêmes dans un service déserté par les médecins titulaires mis en quarantaine après avoir été en contact avec un patient infecté par un agent pathogène non identifié.
Pas de bouée de sauvetage
Loin des praticiens héroïsés des séries américaines, les personnages de Thomas Lilti sont criants de vérité. Entre Hugo (joué par Zacharie Chasseriaud), fils de ponte en médecine mais interne médiocre, Alyson (Alice Belaïdi) qui doute de ses capacités à travailler à l'hôpital, et Chloé (Louise Bourgoin), médecin prometteur mais à la tête dure, le réalisateur ausculte le paradoxe du troisième cycle des études médicales qui plonge brusquement les étudiants dans le grand bain de l'hôpital souvent sans bouée de sauvetage.
À travers leur quotidien, c'est aussi la réalité parfois cruelle d'un hôpital public français en crise qu'on entrevoit. « Cette série a une dimension sociale et politique très forte », reconnaît ainsi Karim Leklou, dont le personnage, Arben, est un FFI (faisant fonction d'interne) franco albanais qui attend sa titularisation. Sujet brûlant à l'heure où les praticiens à diplôme étranger se mobilisent pour sortir de leur précarité juridique et statutaire. Manque de moyens, managers désarmés, conflits entre services, patients ingérables : de nombreuses failles de l'hôpital public sont évoquées.
Comédiens versus carabins
Conscient qu'il avait face à lui un public averti, Thomas Lilti jouait gros en dévoilant sa série devant des carabins de tous cycles confondus. « Malgré l'effet loupe qu'apporte la fiction, j'ai essayé d'être le plus fidèle possible à ce que vous vivez quotidiennement, j'espère que vous trouverez ça réussi », a-t-il prudemment annoncé à l'auditoire avant la projection.
Le réalisateur ne s'y trompait pas. Tout au long des épisodes (deux fois cinquante minutes de projection), les carabins n'ont manqué aucun détail. Entre les francs éclats de rire à chaque erreur des internes inexpérimentés de la série, des étudiants se sont prêtés au jeu du diagnostic : « Mais c'est n'importe quoi, il n'a pas besoin d'un ECG celui-là ! » ou encore « je vous l'avais dit, c'était bien une rupture de varices œsophagiennes ! », a-t-on pu entendre résonner dans l'amphithéâtre.
Pas vraiment le genre de public qu'ont l'habitude de rencontrer les acteurs qui, malgré l'ovation, ont souvent fait les frais de l'humour carabin. Très rapidement, la séance de questions s'est transformée en interrogation surprise. « Pensez-vous vraiment que l'injection de midazolam était la bonne solution ? », a demandé un interne en psychiatrie à... Louise Bourgoin sous les rires de la salle. Évidemment incapable de répondre, cette dernière, comme les deux acteurs qui lui donnent la réplique, a reconnu « avoir tout découvert du monde médical et hospitalier grâce à cette série ».
Le tournage ayant été réalisé à l'hôpital Robert Ballanger d'Aulnay-sous-Bois, les comédiens ont pu profiter de l'expérience de vrais professionnels de santé parmi les figurants pour leur apprendre les gestes et le vocabulaire. Bon élève, Karim Leklou avait bien appris sa leçon. Interrogé sur l'hyperkaliémie, l'acteur répond « c'est pas un truc avec le potassium ? ». Rires et applaudissements nourris dans l'auditoire qui, au vu de son enthousiasme, devrait se précipiter sur les épisodes suivants.
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