Payer pour obtenir un rendez-vous plus rapidement ? C’est ce que propose DoctoChrono, une société se décrivant comme « organisateur de rendez-vous médicaux prioritaires ». Contre 30 à 40 euros, l’entreprise propose de vous trouver un rendez-vous « dès demain » chez un allergologue, un ORL… Ou encore pour une IRM, un scanner ou une échographie. En cas d’échec, la société n’encaisse rien.
« Du marché noir » pour l’UFML-S
Sans surprise, l'offre ulcère les médecins. L’UFML-S, syndicat présidé par le Dr Jérôme Marty, a d'ailleurs annoncé mardi qu’il s’apprêtait à saisir l’Ordre des médecins pour dénoncer le « renforcement des inégalités d’accès aux soins » engendrés par ce service ainsi que la « monétisation et financiarisation du soin ».
« C’est du marché noir, ni plus ni moins, s’insurge le Dr Marty, contacté par Le Généraliste. DoctoChrono profite de la crise actuelle de l’accès aux soins pour gagner de l’argent. »
Pour le patron de l’UFML-S, l’existence d’un tel service crée une inégalité économique et de prise en charge. « Un rendez-vous pour lequel un patient a payé 30 à 40 euros est peut-être beaucoup moins urgent que celui qui en a besoin mais qui ne peut se permettre de payer et qui doit attendre six mois, fulmine le Dr Marty. On n’est plus dans la médecine mais dans la monétisation ! Et il peut y avoir une perte de chances pour un patient ! »
Vers un réseau de soins ?
Pour l’UFML-S le développement de la société risque de poser problème : « Plus DoctoChrono va acheter des pools de rendez-vous, moins il y en aura de disponibles pour les patients. Ils auront donc plus de difficultés et donc encore plus besoin de cette société », estime Jérôme Marty.
Enfin, le généraliste de Fronton (Haute-Garonne) redoute à terme la création d’un réseau de soins. « La société se développant, elle pourrait très bien être rachetée par un réseau de mutualistes ou d’assureurs, imagine-t-il. Lesquels orienteraient via DoctoChrono des patients vers les médecins qui travaillent pour eux. »
Pas de « médecine à deux vitesses », répond DoctoChrono
La société a réagi dès vendredi, après avoir été interpellée sur Twitter. Se décrivant comme « un nouveau service au croisement de la conciergerie médicale et des sites de prise de rendez-vous en ligne », DoctoChrono affirme ne pas faire de « vente de rendez-vous » et indique s'efforcer « de pratiquer des tarifs raisonnables ». Elle assure également ne pas « reverser d’argent aux centres et professionnels de santé ». « Il ne s’agit nullement de médecine à deux vitesses », insiste DoctoChrono.
L'« organisateur de rendez-vous médicaux prioritaires » fait valoir que nombre de ses utilisateurs « ne sont pas à l’aise avec le système de santé ou n’osent pas demander à être vu en priorité ». « Ce service a aidé de nombreuses personnes qui préfèrent payer un coordinateur pour se charger de recherches à leur place : des cadres pressés certes, mais également des personnes âgées, des patients qui n’ont pas d’entourage pour les aider, des personnes qui recherchent des rendez-vous pour des membres de leur famille », souligne enfin la société.
Dernière minute : mardi soir, DoctoChrono a dépublié l'offre commerciale sur son site et affiché ce message : « Dans l’attente de l’étude des allégations sur l’activité de notre société, nous suspendons l’ensemble des services qu’elle propose ainsi que le fonctionnement du présent site ».
(Article mis à jour mardi 9 avril à 18:20)
« Ce que fait le député Garot, c’est du sabotage ! » : la nouvelle présidente de Médecins pour demain à l’offensive
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences