Après un faux départ qui avait vu les syndicats de médecins libéraux dénoncer l’approche « productiviste » de l’Assurance maladie, la négociation conventionnelle sur les assistants médicaux était repartie sur de bons rails. Mais le temps presse — deux séances sont encore prévues — et de nombreux détails restent à régler. À défaut de progrès, les syndicats pourraient ne pas signer l’avenant conventionnel.
« Avec ce qui a été accordé aux pharmaciens (prescription, tests d’angine, ndlr) et la parution des missions des infirmières de pratique avancée, on va se faire massacrer si on n’a pas un accord qui tient vraiment la route, prévient le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF. Actuellement, c’est insignable ! » Le Dr Jacques Battistoni, président de MG France, constate que les parties ont toutes « envie d’aboutir » à un accord mais estime que le dispositif proposé par la Cnam n’est pas encore assez lisible. « Il faut qu’il le soit plus, pour qu’on puisse en assurer facilement le service après-vente auprès de nos confrères », explique-t-il.
Ce mercredi, pour l’antépénultième séance de négociation sur les assistants, les propositions de la Cnam avaient très peu changé par rapport à la dernière réunion, qui avait vu la caisse proposer un financement pérenne mais dégressif.
Un assistant pour deux médecins, réclament les syndicats
Le nombre de médecins bénéficiant des services d'un même assistant est pour l'heure le principal point de blocage. Alors que la caisse propose de financer un assistant pour trois médecins employeurs, les syndicats réclament le financement d’un poste pour deux praticiens.
« Un assistant pour trois médecins, ça signifie que l’assistant n’est là que 12 heures par semaine et que le reste du temps, le médecin travaille à l’ancienne. Ce n’est pas possible, lance le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF. C’est illisible pour les patients. Et cela veut également dire que l'assistant s’occupe avant tout de tâches transversales, ce qui ne permet pas ou peu d’augmenter la patientèle médecin traitant (MT) ». Le Dr Duquesnel souligne que le modèle idéal est celui d’un assistant pour un médecin. « C’est ce qui se fait à l’étranger, comme en Allemagne, oui ici, chez les médecins qui en ont déjà un. »
Le patron du SML, le Dr Philippe Vermesch, se montre optimiste et estime que Nicolas Revel, le directeur général de la Cnam, devrait accéder à cette demande. « La caisse a au moins autant intérêt que nous à ce que l’assistant se mette en place et donc à faire en sorte que les médecins y trouvent leur compte », juge quant à lui le Dr Battistoni.
Un peu de mou sur les contreparties
Une seule véritable concession est à signaler dans les propositions de la Cnam : l’abandon de l’introduction d’indicateurs de qualité fondés sur des questionnaires de satisfaction de patients, qualifiée trois semaines auparavant par le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF, de « délire total ».
Concernant les contreparties attendues en l’échange du financement d’un assistant médical, la caisse semble avoir légèrement reculé. Au lieu de devoir à la fois augmenter leur patientèle médecin traitant et leur file active, les praticiens pourraient n’avoir qu’à remplir l’une de ces conditions. La caisse estime que ces deux indicateurs sont « très corrélés » et propose qu’en « cas d’écart pour un médecin donné » l’indicateur « le plus favorable » soit pris en compte « pour déterminer les objectifs fixés ».
Alors que le président de MG France, le Dr Jacques Battistoni souhaitait relever l’aide pérenne de l'Assurance maladie à 24 000 euros, les montants de financement proposés par la Cnam n’ont pas évolué. Pour un assistant équivalent temps plein (ETP), le financement de la caisse reste de 36 000 euros la première année, 27 000 la seconde, avant de tomber à 21 000 à partir de la troisième année. Une dégressivité qui agace le Dr Jean-Paul Hamon : « La France est en train de se désertifier mais la CNAM ne veut pas lâcher un rond ! »
Les tranches d'activité modifiées
L’Assurance maladie est également revenue sur ses tranches d'activité — qui déterminent les objectifs d'augmentation de l'activité des médecins bénéficiant d'une aide — et en a ajouté une quatrième.
Désormais, le financement d’un poste d’assistant médical est accessible aux médecins dont la patientèle est supérieure 618 patients, contre 740 dans le précédent projet d’avenant. La Cnam a également consenti un effort sur le seuil à atteindre pour n’avoir qu’à maintenir son activité : les médecins dont la patientèle MT est supérieure à 1 479 patients sont concernés. Le seuil était précédemment fixé à 1 693.
L'Assurance maladie a précisé les objectifs d'augmentation de patientèle médecin traitant et de file active des patients attendus grâce aux assistants :
• Patientèle MT comprise entre 618 et 854 patients : + 20 %
• Patientèle MT comprise entre 854 et 1 088 patients : + 15 %
• Patientèle MT comprise entre 1 088 et 1 479 patients : + 7,5 %
• Patientèle MT supérieure à 1 479 patients : maintien de l’activité
Le projet d'accord prévoit qu'en cas de non-atteinte de cet objectif pendant les deux premières années, l'aide soit intégralement versée. En revanche, si au-delà l'objectif n'est pas respecté, « l'aide pourra être ajustée à la baisse ».
Une autre modification importante a été proposée, cette fois-ci en défaveur des médecins. Le précédent projet d’avenant prévoyait de maintenir à 36 000 euros par an (sans dégressivité) le financement d'un assistant pour tous les médecins ayant une très grande patientèle afin de compenser « l’absence de gain généré par l’augmentation de l’activité ». La nouvelle version propose que cette faveur ne soit accordée qu’aux médecins à forte patientèle exerçant en zone sous-dense.
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