Après que le « Grand débat » a mis en lumière les craintes des Français pour leur santé, Agnès Buzyn défend les mesures prises pour lutter contre les déserts médicaux depuis son arrivée à l’Avenue Duquesne dans une interview accordée au Journal du Dimanche.
« J’ai pris ce sujet à bras-le-corps en lançant un plan d’urgence dès octobre 2017, puis la stratégie "Ma Santé 2022" », souligne Agnès Buzyn, qui précise qu’elle n’ignorait rien de l’ampleur de la situation au moment de succéder à Marisol Touraine.
Dans cet entretien, la ministre réaffirme son opposition à la coercition à l’installation des médecins, à laquelle huit Français sur dix y sont favorables. La ministre fait également valoir qu’elle prépare d’ores et déjà l’avenir avec la suppression du numerus clausus. Surtout, elle défend certaines mesures déjà prises, ou sur le point de l’être (généralisation progressive de la vaccination antigrippale en pharmacie, création de 4 000 postes d'assistants médicaux d'ici à 2022 et d'un millier de CPTS). « L’incitation, la délégation, ça marche », selon la ministre. « Tout ce que nous mettons en place permettra de libérer 3 millions de consultations, soit l’équivalent de 800 médecins généralistes supplémentaires pour soigner de nouveaux patients », affirme Agnès Buzyn.
Une centaine d’élus exhorte Buzyn à favoriser les téléconsultations
La ministre de la Santé évoque également la téléconsultation et souligne que la généralisation de leur remboursement (via un avenant à la convention négocié par les syndicats de médecins et l’Assurance maladie) est l’une des premières mesures qu’elle a prises.
Néanmoins, dans le même JDD, 118 élus (parmi lesquels Jean-Pierre Door, Philippe Vigier et Arnaud Robinet) publient une tribune invitant Agnès Buzyn à accélérer sur le sujet. Selon eux, seuls 7 939 actes de téléconsultations ont été remboursés en six mois. « L’objectif des 500 000 initialement prévus en 2019 semble donc inatteignable », lancent-ils.
Les élus souhaitent élargir les conditions de remboursement de ces téléconsultations. Pour l'heure, hors exemptions, seuls les actes réalisés à distance par le médecin traitant le sont. Les signataires regrettent que malgré l’existence d’une « impulsion politique et transpartisane », des « blocages administratifs limitent la portée » du remboursement. Pour ces élus, cette condition est paradoxale, l'objectif de la généralisation des téléconsultations étant de venir en aide « aux patients qui n’ont précisément pas accès aux soins près de chez eux ». Les signataires affirment qu’une « exigence de pragmatisme et d’efficacité » doit guider les décisions.
Une solution rejetée par la ministre
Pour la CSMF, « l’intention est louable » mais « il est illusoire de croire que la télémédecine sera la panacée pour mettre fin aux problèmes d’accès aux soins ». « Une téléconsultation ne remplacera jamais une consultation en cabinet : ce n’est qu’un complément ou une alternance dans le cadre d’un suivi médical, souligne le syndicat. Voir la télémédecine comme un remède miracle relève d’une vision très simpliste du système de santé français dans lequel la qualité, la coordination et le parcours de soins tiennent une place primordiale et nécessaire. »
De son côté, la ministre affirme que plus de 11 500 téléconsultations ont déjà été réalisées. « Il faut le temps que les médecins s’équipent, construisent leur réseau et que les patients le demandent, ce qui n’est pas encore dans les habitudes », justifie-t-elle.
Craignant une dérive commerciale du secteur, Agnès Buzyn souligne qu’« un lien avec les professionnels de proximité est nécessaire pour bien orienter le patient ». « Sinon, le risque serait d’aggraver les déserts médicaux », conclut-elle.
« Ce que fait le député Garot, c’est du sabotage ! » : la nouvelle présidente de Médecins pour demain à l’offensive
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences