Le gouvernement pousse-t-il le bouchon un peu trop loin ? Le Syndicat national des médecins spécialistes en ORL et chirurgie cervico-faciale (Snorl) met en garde aujourd’hui le gouvernement contre les transferts de tâches médicales vers d’autres professions, sans concertation.
Le « pacte Bayrou » contre les déserts médicaux contient en effet plusieurs annonces générales, qui faute de précisions, ont mis les ORL en alerte. Il évoque pour le pharmacien d’officine la possibilité de prendre en charge un patient souffrant de rhinite allergique saisonnière avec une ordonnance échue. Pour le syndicat des ORL, cette proposition est acceptable « si elle se limite à un renouvellement d’ordonnance », car la maladie « nécessite une évaluation médicale régulière ».
Autre mesure du plan Bayrou : la prise en charge toujours par le pharmacien de sinusites aiguës sur la base de protocoles décisionnels validés par la Haute Autorité de santé (HAS), y compris la possibilité de prescrire une antibiothérapie. « Nous ne comprenons pas cette proposition. Une sinusite aiguë maxillaire non compliquée ne nécessite pas d’antibiothérapie », objecte le Snorl. Ce transfert de tâches expose à des « prescriptions excessives d’antibiotiques dans des cas non justifiés et des retards diagnostiques sur des complications », avance le syndicat.
Le plan du gouvernement propose également de confier le retrait des bouchons de cérumen aux audioprothésistes pour libérer du temps médical. Et l’exécutif n’a pas tardé sur ce plan : se greffant sur la proposition de loi Mouiller (groupe LR), adoptée par le Sénat, le gouvernement a fait voter un amendement prévoyant un décret définissant les actes réalisés par les audioprothésistes comme « le retrait non instrumental des bouchons de cérumen ». Une évolution qui, là encore, préoccupe le Dr Nils Morel, président du Snorl, contacté ce jeudi par Le Quotidien. « Il m’arrive de voir des gens qui ont un bouchon de cérumen difficile à enlever mais qui peut masquer une pathologie du conduit auditif, du tympan. Ce n’est pas toujours simple, prévient le spécialiste d’Échirolles (Isère). C’est possible si le patient est connu et suivi par l’audioprothésiste et si le médecin qui a prescrit l’appareillage a bien précisé l’absence d’anomalie du conduit auditif et du tympan ». Bref, le diable se niche dans les détails.
En tout état de cause, la multiplication des « accès directs » aux non-médecins est, aux yeux du président du Snorl, « une façon de nier le métier de médecin » avec des conséquences possibles sur le plan de la qualité des soins et de la responsabilité.
Dans la période actuelle de pénurie médicale et en attendant l’arrivée des futurs spécialistes diplômés, le Snorl préconise notamment d’inciter au cumul emploi retraite (par la réduction des charges des praticiens concernés), de favoriser les remplacements en libéral, de développer les stages ORL pour les internes et d’accélérer le déploiement des assistants médicaux avec aide à l’embauche.
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