Les médecins seront-ils un jour autorisés à faire de la pub ? Après le conseil d’État, l’Autorité de la concurrence ouvre, à son tour, la porte à cette possibilité, invoquant la jurisprudence européenne.
Chargée d'arbitrer un litige opposant les conseils de l'Ordre des médecins (CNOM) et des chirurgiens-dentistes (CNOCD) à la société Groupon (site d'offres commerciales), l'Autorité de la concurrence a profité de l'occasion pour « insister sur la nécessité de modifier les dispositions du code de la santé publique », interdisant aux médecins toute publicité, « afin de les mettre en conformité avec le droit européen ».
Une interdiction contraire au droit européen
Pour l’Autorité de la concurrence, les articles du code de la santé publique prévoyant une interdiction générale et absolue de toute publicité, directe ou indirecte, pour les médecins et dentistes depuis 1947 « ne sont pas compatibles avec l'article 56 TFUE et la directive 2000/31/CE sur le commerce électronique ».
« Ce constat a également été effectué par le Conseil d'État dans un avis transmis au gouvernement, précise-t-elle. Or il appartient à toute autorité administrative d'écarter une disposition de droit interne incompatible avec le droit européen, et d'en tirer les conséquences dans son office de répression des actes anticoncurrentiels. »
Jusqu’en septembre 2017, des soins médicaux à visée esthétique et d’autres non médicaux, effectués par des médecins ou dentistes, étaient proposés à des prix réduits sur le site de Groupon. Reprochant à la société de violer les codes de déontologie de leur profession ainsi que certaines dispositions du code de la santé publique, le CNOM et le CNOCD, avaient engagé des actions auprès de différentes juridictions et administrations contre Groupon.
En mars 2017, Groupon avait déposé plainte contre le CNOM et le CNOCD auprès de l'autorité de la concurrence, estimant que les conseils dissuadaient les professionnels de santé de recourir à ses services par crainte des sanctions disciplinaires.
Dans ce litige, l’Autorité de la concurrence estime ne pas être compétente pour se prononcer sur les pratiques reprochées aux deux ordres car celles-ci « relèvent de l'accomplissement par ces deux ordres des missions de service public qui leur sont dévolues par la loi, en particulier, le devoir de veiller au respect de la déontologie par les médecins et chirurgiens-dentistes et la défense de l'honneur et de l'indépendance de leurs professions ».
Une refonte des dispositions réglementaires applicables à venir
L'Autorité souligne par ailleurs que le droit européen laisse toute liberté aux États membres de définir des réglementations relatives à la publicité des professions libérales, dès lors que celles-ci ne comportent pas d'interdiction générale et absolue. Ce qui devrait permettre d'encadrer une éventuelle autorisation de la publicité pour les professions médicales.
« En séance, la représentante du Ministère des Solidarités et de la Santé a indiqué à cet égard que le gouvernement et plusieurs ordres professionnels - dont ceux des médecins et des chirurgiens-dentistes - travaillaient à la refonte des dispositions réglementaires applicables à la publicité, avec l'objectif d'adopter de nouvelles dispositions dans un délai de 6 à 12 mois », conclut l'Autorité de la concurrence.
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