Presque dix ans après la révélation du scandale du Mediator, le procès s’est ouvert hier au tribunal correctionnel de Paris.
2 684 des 4 981 victimes se sont constituées parties civiles avant l'ouverture du procès, parmi lesquelles 100 caisses de sécurité sociale. Ce nombre de parties civiles est susceptible d'évoluer tout au long du procès, jusqu'aux réquisitions du parquet.
Sur le banc des prévenus, onze personnes morales et douze personnes physiques vont comparaître jusqu’en avril 2020. Elles sont poursuivies pour sept types d’infractions.
La maison mère des Laboratoires Servier et neuf filiales du groupe devront répondre de diverses infractions : « tromperie aggravée », « homicides et blessures involontaires » mais aussi « escroquerie » au préjudice de la sécurité sociale et des mutuelles. Deux anciens cadres de la firme sont également renvoyés : son ancien numéro deux Jean-Philippe Seta et son ex-secrétaire général Christian Bazantay.
L'ANSM et ses anciens membres parmi les prévenus
L’ANSM (anciennement Afssaps, Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, au moment du scandale) sera jugée pour « homicides et blessures involontaires » pour avoir tardé à suspendre l'AMM du médicament.
Pour les juges, « l'inertie » de l'Agence du médicament s'explique en partie par une « mise sous influence financière » par le groupe Servier « de nombreux responsables, agents et experts des autorités de santé ». Plusieurs responsables de l'Afssaps chargés du suivi du Mediator étaient ainsi d'anciens salariés des laboratoires Servier ou le sont devenus rapidement après avoir quitté l'Agence du médicament. C'est le cas de Jean-Michel Alexandre, ex-directeur de l'évaluation du médicament à l'Afssaps, rémunéré « très généreusement » comme « conseiller personnel » de Servier juste après son départ, et de Charles Caulin, membre pendant 17 ans de la commission d'autorisation de mise sur le marché de l'Afssaps, dont il fut aussi président, puis devenu consultant de la firme. Un ex-cadre de l'Afssaps chargé de la pharmacovigilance, Éric Abadie, mis en cause pour avoir caché que son épouse était l'avocate des laboratoires, est décédé depuis son renvoi en correctionnelle.
Des membres de la HAS, du ministère de la Santé et une ex-sénatrice
Trois experts rémunérés par Servier, Michel Detilleux, Jean-Roger Claude et Bernard Rouveix, qui parallèlement siégeaient à des commissions des autorités de santé statuant notamment sur des produits du groupe pharmaceutique, sont renvoyés pour « prise illégale d'intérêts ». Seront jugés pour le même délit François Lhoste, qui fut chargé de mission au ministère de la Santé, et Jacques Massol, ancien membre de la Haute Autorité de santé et de la Direction générale de la santé.
L'instruction a également révélé les liens troubles entre la firme et le monde politique mais seule une élue, l'ex-sénatrice Marie-Thérèse Hermange, prendra place sur le banc des prévenus. Elle est soupçonnée d'avoir modifié la rédaction finale d'un rapport sur le Mediator, après une « visite clandestine » au Sénat d'un conseiller du groupe Servier et ancien directeur général de l'Inserm, Claude Griscelli, révélée par une écoute téléphonique. M. Griscelli répondra devant le tribunal de « trafic d'influence » et l'ex-sénatrice de complicité de ce délit.
Plus de 100 personnes pourraient être appelées à témoigner au cours des 110 audiences prévues. Les débats doivent durer jusqu'en avril 2020.
(avec AFP)
[CHRONOLOGIE] Les grandes dates du scandale Mediator
Quatre généralistes font vivre à tour de rôle un cabinet éphémère d’un village du Jura dépourvu de médecin
En direct du CMGF 2025
Un généraliste, c’est quoi ? Au CMGF, le nouveau référentiel métier redéfinit les contours de la profession
« Ce que fait le député Garot, c’est du sabotage ! » : la nouvelle présidente de Médecins pour demain à l’offensive
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent