Avec près de 130 millions de boîtes vendues par an et 11,5 millions de consommateurs, la France compte parmi plus gros consommateurs de benzodiazépines (BZD) en Europe. Pour lutter contre cette surconsommation, le Collège National des Généralistes Enseignants (CNGE) vient d’émettre plusieurs recommandations qui mettent en avant les alternatives non pharmacologiques. La société savante s’inquiète aussi des risques qu’il y aurait à miser sur des mesures d'encadrement des prescriptions, comme la limitation des ordonnances à un mois, ou la restriction des prescriptions aux psychiatres.
Évoquées à plusieurs reprises en haut lieu, ces mesures ne se justifient pas sur le plan scientifique argue le CNGE. En effet « la limitation de la durée de prescription des BZD à moins de 3 mois n’a pas d’efficacité démontrée » justifie le collège. Quant à, la limitation de prescription aux psychiatres, cette option « risquerait d’entraîner une désorganisation du parcours de soins des patients, un morcellement des prises en charge et une majoration des inégalités sociales de santé dans les zones démunies en psychiatres ». De plus, « les risques liés au syndrome de sevrage pourraient augmenter si les patients avaient plus de difficultés à se procurer leur traitement ».
Plutôt que de contraindre les prescripteurs, le CNGE propose donc, au contraire, de mieux les impliquer dans des approches « alternatives » et multidisciplinaires. Pour limiter d’emblée la prescription initiale des BZD et apparentés, « de nombreuses thérapeutiques non médicamenteuses sont validées, par exemple dans la prise en charge des troubles du sommeil : restriction de sommeil, contrôle de stimulus, relaxation musculaire, thérapies cognitivo-comportementales, indique le CNGE. Il existe aussi des preuves d’efficacité pour des traitements alternatifs, comme le suivi à distance : téléphone, internet, ou apport d’un gestionnaire de soins.
Cependant « leur faible disponibilité, la nécessité d’être formé ou leur coût sont des limites à leur prescription », reconnaissent les généralistes enseignants. La société savante préconise également d’accompagner le sevrage, en s’appuyant, là encore, sur des approches psychosociales « Les stratégies combinées (psychothérapie, intervention pharmacologique, suivi coordonné) ont démontré un effet sur le sevrage ». Selon une méta analyse récente, traiter trois patients permet d’obtenir une réduction de consommation chez l’un d’entre eux. Cette réduction persiste à moyen terme pour 2 patients traités et semble se maintenir à 3 ans. « En soins primaires, des mesures d’intervention brève (consultation dédiée, remise d’une lettre au patient) ont également montré leur efficacité sur le sevrage ».
Pour le CNGE, plutôt que la prescription encadrée, les axes à privilégier pour lutter contre les sur-prescriptions de BZD sont donc « la valorisation de ces procédures, l’amélioration de l’organisation et de la coordination du système de santé, la sensibilisation des patients et la formation des professionnels ».
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