Le Haut conseil à l'Egalité fait vendredi 21 recommandations pour améliorer l'accès aux soins de santé des femmes en situation de précarité. Le Haut conseil signale l'"urgence" de la situation, dans un rapport remis vendredi à la secrétaire d'Etat en charge de l'égalité femmes-hommes, Marlène Schiappa.
Ce document fait le constat que les femmes sont plus exposées que les hommes aux troubles psychologiques, et encore plus si elles vivent dans la précarité. Ces dernières ont un moindre suivi gynécologique que les autres femmes, ont moins souvent recours aux dépistages du cancer du sein et de l'utérus. La mortalité prématurée liée à des maladies cérébro-cardiovasculaires chez les ouvrières est en moyenne trois fois supérieure à celle des cadres et professions intermédiaires. Ce qui s'explique notamment par des risques accrus liés à la précarité (tabac, alcool, surpoids). Selon une étude de juin 2016 citée dans le rapport, les femmes représentent 64% des personnes ayant reporté ou renoncé à des soins au cours des 12 derniers mois.
Le rapport s'intéresse aussi à la situation des femmes migrantes, les barrières linguistiques et culturelles s’ajoutant chez elles aux freins qui compliquent leur accès aux soins. Il cite à ce propos le témoignage de deux praticiens. Didier Boeno et Maëva Jego-Sablier, médecins généralistes exerçant dans le 3ème arrondissement de Marseille198, signalent notamment la difficulté de prendre un médicament quand on ne sait pas lire, avec des difficultés d’observance qui peuvent en découler...
En raison de leurs spécificités, le Haut Conseil préconise, parmi 21 recommandations, d'"intégrer le genre dans les politiques publiques" de lutte contre les inégalités sociales de santé, et de généraliser la publication de statistiques sexuées en matière de santé au travail. Pour mieux prendre en compte les contraintes des emplois occupés majoritairement par des femmes précaires, il recommande de modifier par décret les seuils des critères de pénibilité, notamment pour reconnaître dans le niveau élevé la manutention de charges peu importantes, mais répétées.
Il souhaite aussi que les critères soient complétés pour inclure la station debout parmi les "postures pénibles", considérer les produits ménagers parmi les "agents chimiques dangereux" et prendre en compte les horaires atypiques.
Formation des professionnels de santé, suivi des patientes précaires par un "référent unique", horaires des lieux de soins adaptés à leurs contraintes figurent également parmi les recommandations du rapport.
Le Dr Gilles Lazimi rapporteur du Haut Conseil sur ce sujet plaide aussi pour un temps de consultation suffisamment long, "préalable à des soins de qualité car ces patientes nécessitent plus d’écoute, plus de temps et plus de prise en charge que des patientes issues de classe sociale favorisée". Ce médecin généraliste du centre municipal de santé de Romainville, et en même temps responsable des actions prévention santé de cette commune de Seine-Saint-Denis résume l'enjeu majeur: « il faut non pas une égalité des soins mais bien une équité ».
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