Le processus de généralisation du tiers payant se révèle chaotique. En janvier dernier, le Conseil constitutionnel a en effet porté un sérieux coup à cette réforme emblématique de la loi de santé en censurant partiellement le dispositif initial, rendu facultatif pour la partie complémentaire. En clair, seuls les médecins volontaires pratiqueront le tiers payant intégral en 2017 (le gouvernement tablant sur une adhésion progressive).
Le 1er juillet 2016, une étape symbolique dans la généralisation du tiers payant a néanmoins été franchie avec la possibilité de pratiquer la dispense d'avance de frais pour toutes les personnes couvertes à 100 % par l'assurance-maladie (ALD et femmes enceintes), soit 11 millions de personnes supplémentaires, selon l'assurance-maladie. Fin décembre, ce sera un droit pour ces patients à 100 %.
Sur le fond, la guerre de positions a continué. La ministre de la Santé a eu beau assurer que le système serait simple, fiable, rapide, et que le règlement serait garanti pour tous les professionnels engagés, rien n'y fait. Les médecins libéraux ne veulent pas du tiers payant obligatoire. Les syndicats continuent de boycotter le comité de pilotage.
Saisie des données
Les pénalités adoptées en juin 2016 en cas de retard de règlement par l'assurance-maladie des feuilles de soins télétransmises (10 % de la valeur de l'acte au-delà de neuf jours ouvrés) n'ont pas suffi à rassurer la profession. Et la dernière réunion, en novembre, de l'association des complémentaires (mutuelles, assureurs, institutions de prévoyance) n'a pas levé les doutes sur les modalités du tiers payant intégral. Les médecins redoutent toujours un système chronophage et contraignant.
En pratique, l'association des complémentaires santé propose aux praticiens de signer un contrat individuel de 14 pages définissant leurs obligations. « Le médecin devra ensuite saisir les données de chaque patient sur le portail IDB [identification des droits des bénéficiaires] avec sa couverture complémentaire annuelle, comparer avec la liste d'opposition aux droits, puis contrôler les paiements complémentaires reçus et réclamer éventuellement auprès de chaque organisme si nécessaire… », se désole le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.
Les médecins devront aussi mettre à jour leur logiciel métier « à leurs frais » pour pouvoir utiliser le nouveau portail. « La mise en place de ce tiers payant sera suffisamment dissuasive pour qu'il ne se mette pas en place », juge le leader confédéral qui a lancé de longue date un appel à la désobéissance civile relayé par plusieurs syndicats.
La profession mise désormais sur l'alternance aux prochaines élections ; François Fillon a promis à plusieurs reprises l'abandon de la généralisation du tiers payant.
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