PLUSIEURS MÉDECINS sont dans le collimateur de Me Christine Ravaz, avocate à Toulon en charge de la défense de Madame X, atteinte d’une valvulopathie après trois années de Mediator. Ils n’ont pas transmis le dossier de Madame X à l’expert. Si les praticiens continuent de faire la sourde oreille, Madame X déposera plainte au pénal contre eux cette semaine, pour entrave à la justice et mise en péril de la vie d’autrui. « La plainte initiale est tournée contre Servier, précise l’avocate. Servier utilise le fait que les médecins ne transmettent pas les documents pour faire reporter les expertises. Ma cliente va donc réclamer directement auprès des médecins l’indemnisation intégrale de son préjudice. C’est le seul moyen de faire avancer son dossier ».
L’avocate des Laboratoires Servier, Me Nathalie Carrère, n’était pas joignable ce vendredi. Le médecin traitant non plus. Le cardiologue concerné par l’affaire, contacté par « le Quotidien », dit tomber des nues. Il a vu Madame X une seule fois, pour une échographie. « L’expert m’a écrit pour me demander si j’ai fait une déclaration de pharmacovigilance, pas pour me demander de communiquer des pièces. La patiente a déjà les résultats de l’échographie. J’ai répondu à l’expert par fax ».
Le dossier de Madame X est le plus avancé parmi les trente dossiers que suit Me Ravaz. De nouvelles expertises vont être ordonnées cette semaine : l’avocate redoute un nouveau silence médical. Elle prévient qu’elle poursuivra systématiquement les médecins, « sans distinction entre le prescripteur et les autres », s’ils ne transmettent pas le dossier.
Ne pas cacher la vérité.
Me Ravaz a alerté le Conseil national de l’Ordre et Xavier Bertrand à propos de ce qu’elle nomme « la défaillance du milieu médical ». Réponse de Christian Poiret, à la Direction générale de la Santé : « Des difficultés de même nature m’ont déjà été signalées ». La DGS, par un courrier du 3 février 2011, a saisi la CNAM, le conseil national de l’Ordre des pharmaciens et quatre syndicats de médecins, « afin qu’ils sensibilisent fortement les agents, pharmaciens ou médecins concernés à la nécessité de communiquer toutes les informations » liées à la prise du benfluorex. L’Ordre des médecins précise de son côté qu’il « n’a pas de pouvoir d’injonction à l’égard des médecins ».
Pour l’avocate, le ministère et l’Ordre bottent en touche. Le Dr André Deseur, porte-parole du CNOM, précise que « seul le juge pénal peut ordonner la saisie du dossier médical ». Il appelle ses confrères à ne pas faire l’autruche. « Un médecin qui a prescrit à tort du benfluorex ne peut rien y changer, c’est fait. Il ne faut pas cacher la vérité. Si on n’a pas de dossier médical, on le dit. Résister, c’est aggraver la situation. Détruire ou maquiller un dossier, c’est une faute qui relève du pénal, les conséquences peuvent être graves ». Le conseil est clair : « Quoi qu’il y ait dans le dossier, il faut le transmettre intégralement ». « Idéalement, complète le Dr Deseur, il faut garder ses dossiers 30 ans ». Y compris pour les médecins retraités. Le cas se présentera peut-être, où une victime réclamera son dossier à un médecin décédé. Si la clientèle n’a pas été reprise pas un confrère, grosses complications en vue : « Les ayants droit de ce médecin sont censés avoir conservé tous les dossiers, mais ils n’ont pas droit d’y accéder. Cela suppose qu’un médecin aille rechercher dans les archives », anticipe le porte-parole du CNOM.
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