C’EST SOUS la double casquette de chercheur sur l’hypertension artérielle et président du conseil scientifique de la fondation Plan Alzheimer que Joël Ménard, par ailleurs professeur émérite de santé publique à l’Université Paris-Descartes, s’est exprimé devant un parterre de généralistes. Fort de ses travaux des années 1980 sur l’hypertension, l’ancien directeur général de la Santé suggère d’appliquer à la prise en charge de l’Alzheimer certaines recettes qui ont montré la preuve de leur efficacité.
À commencer par le rôle des médecins généralistes. « Ils assument le dépistage de l’hypertension artérielle, l’éducation des patients, la surveillance au long court, la liaison entre l’hôpital et le médecin de ville et la prévention », énumère-t-il. Si bien que ces professionnels suivent entre 100 et 300 personnes par an souffrant de cette pathologie. Contre seulement une dizaine de patients atteints de la maladie d’Alzheimer.
Le plan Alzheimer 2008-2012 devrait faire changer la donne, en plaçant le patient au cœur des dispositifs et en faisant de son suivi une priorité. À travers les 3 axes d’action (mieux connaître la maladie, améliorer la qualité de vie des malades et aidants, et se mobiliser en faveur de cet enjeu de société), servis par une enveloppe totale de 1,6 milliard d’euros, « il ne s’agit pas de créer de nouvelles maisons d’accueil mais de simplifier, d’évaluer et d’orienter ce qui existe déjà », explique le Pr Ménard. Les généralistes, chargés de l’annonce du diagnostic et de la mise en place de l’accompagnement, parfois à l’aide de spécialistes, deviennent la cheville ouvrière du parcours de soin. Et pour apaiser certaines de leurs réticences, par exemple leur hésitation à annoncer au patient un mauvais diagnostic ou leur malaise à délivrer des informations sur l’aide sociale, à cordonner les soins ou à affronter les troubles du comportement, une visite longue (VL) est en passe d’être créée. « Il faut donner le temps au médecin d’aller au domicile du patient, pour considérer avec les aidants tous les problèmes. Cela permettra d’évaluer l’autonomie, de prévenir l’iatrogénie médicamenteuse, de repérer un épuisement de l’aidant et d’informer sur la coordination des soins dans les Maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer (MAIA) », explique le Pr Ménard. Il incite également les généralistes à effectuer des diagnostics précoces, même si l’annonce n’est pas évidente, en l’absence de tout traitement.
Contre la suppression de l’ALD 12
« Les généralistes doivent s’investir dans l’information, adopter une vision à long terme et faire preuve de courage pour maintenir la classification de l’hypertension artérielle sévère en affection longue durée », a lancé Joël Ménard à son auditoire, liant les recherches sur l’Alzheimer et celles sur l’hypertension. « Les cerveaux autopsiés des patients atteints d’Alzheimer montrent des traces d’accident vasculaire cérébral. Or plus la tension est haute, plus le risque de faire un AVC est grand. Donc, il faut faire baisser la tension. Et refuser la suppression de l’ALD 12 », explique le professeur, en rappelant que les patients placés dans cette catégorie présentent des risques de mortalité 5,8 fois plus importants que la moyenne. L’argument économique pèse également en faveur du maintien de l’ALD 12. S’il est supprimé, les consultations chuteront car certaines familles ne pourront assumer le reste à charge. Mais les hospitalisations, très chères, exploseront. « Ce n’est en rien un gain financier », assure Joël Ménard, qui a néanmoins affiché sa confiance en Xavier Bertrand, ministre de la Santé, pour revenir sur une décision néfaste à la santé publique.
L’actuel directeur général de la Santé, Jean-Yves Grall, n’a pas dit autre chose, peu avant la séance inaugurale, en incitant les généralistes à jouer un rôle toujours plus grand en santé publique, notamment en terme de vaccination.
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