La loi Handicap de 2005 prévoit que tous les établissements recevant du public devront être accessibles aux personnes handicapées à compter du 1er janvier 2015. Théoriquement, dans moins d’un an, tout médecin libéral qui n’aura pas entamé de démarches pour être conforme à la loi pourra faire l’objet d’une plainte ou de sanctions pénales. Les récalcitrants risquent une mise sous scellés ou 45 000 euros d’amende. 68 000 médecins libéraux sont directement concernés, soit 60 % de la profession.
Devant l’inquiétude des professionnels (mais aussi des petits commerçants ou du secteur du transport), le Premier ministre a demandé à la sénatrice Claire-Lise Campion (Essonne) d’entamer une concertation avec les professionnels de santé, les associations de patients et les collectivités territoriales. Jean-Marc Ayrault doit présenter mercredi le résultat de ces discussions. Un projet de loi au printemps puis une ordonnance permettront au gouvernement de présenter de nouveaux agendas d’accessibilité programmée (Ad’AP), accordant un délai supplémentaire aux cabinets médicaux pour réaliser les aménagements nécessaires.
Un ascenseur à 45 000 euros
Ad’AP. Derrière ce nom barbare se cache une procédure qui exemptera le médecin de sanctions, à condition qu’il s’engage avant le 31 décembre 2014 à se mettre en conformité avec la loi. Le professionnel dispose ensuite de six mois pour établir un dossier sur son activité (la date butoir doit être rendue par ordonnance en juillet 2014). Ce dossier devra comprendre une expertise technique et architecturale du cabinet médical ; le montant des travaux, de quelques centaines d’euros (dispositifs de signalement d’escaliers et de vitres pour malvoyants, interphone spécifique pour malentendants…) à plusieurs milliers (45 000 euros pour un ascenseur conforme) ; un calendrier d’action de mise aux normes. Le médecin pourra demander une dérogation de trois ou quatre ans (voir encadré), arguments à l’appui.
Une commission ad hoc devra rendre un avis sur chaque dossier dans un délai de quatre mois. Après validation de la Préfecture, aucun appel ne sera possible pour le praticien, hors recours gracieux.
Face à l’ampleur des travaux potentiels pour les médecins qui exercent en zone urbaine, la sénatrice UMP du Val-de-Marne Catherine Procaccia a d’ores et déjà pointé du doigt les risques de fermeture anticipée des cabinets.
Inégalités d’accès aux soins
Pour les associations, la loi Handicap répond à un enjeu de santé publique pour les 9,6 millions de personnes handicapées. « Nous souhaitons que tous les médecins jouent le jeu de l’accessibilité, sans exception, indique l’association des paralysés de France (APF), très impliquée sur le dossier. Mais qu’ils se rassurent ! Tout projet économiquement non viable obtiendra une dérogation ».
Les médecins, eux, oscillent entre inquiétude et colère. Manque d’informations, inutilité de la démarche au regard du coût des travaux, ajout d’une couche au millefeuille administratif, nouvelle politique de sanction…
Avant mercredi, l’Union nationale des professions libérales (UNAPL) tentera une nouvelle fois de convaincre le Premier ministre d’assouplir la loi en augmentant les échéances (et les dérogations) de trois à six ans. L’UNAPL suggère que des locaux adaptés soient mis à disposition des médecins libéraux pour accueillir les personnes handicapées. Elle demande que les médecins en fin de carrière (à trois ans de la retraite) mais aussi les praticiens à qui la copropriété interdit des travaux soient dispensés de ces aménagements. La profession demande enfin que les visites à domicile soient privilégiées. Cette alternative est soutenue par MG France et la Fédération des médecins de France, et correspond déjà au quotidien de nombreux professionnels.
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