UN RÉSEAU de neurones artificiels (RNA) opère d’une façon analogue aux réseaux de neurones du cerveau. En particulier, la réaction du logiciel à une situation qui lui est soumise, varie en fonction de la quantité de connaissances que celui-ci a accumulée auparavant. Le mécanisme d’apprentissage du RNA est semblable à celui qui va conduire un enfant qui s’est brûlé plusieurs fois à éviter de toucher le fourneau. Ainsi, pour l’entraîner, au lieu d’y introduire un modèle déjà conçu, les chercheurs présentent au RNA des données et les effets ou interprétations qui leur sont associés. Le réseau, après un traitement de cette information de type statistique, devient capable de prédire le résultat particulier correspondant à un ensemble de données nouvelles qui lui sont proposées. Et (n’ayant pas d’amour-propre à protéger) il estime également, sous forme de pourcentage, le degré de confiance qu’il a dans la solution offerte.
Le Dr Rizwan Sohail a indiqué, lors d’une conférence récente*, que son équipe avait introduit dans un RNA l’information contenue dans près de 200 dossiers de patients. Ces malades avaient été admis au centre de Rochester de la clinique Mayo, dans le Minnesota, pour le traitement d`endocardites infectieuses provoquées par des pacemakers permanents ou des défibrillateurs automatiques implantables.
Probabilité de99 %.
La comparaison de plusieurs stratégies de sélection des données fournies au RNA a conduit les chercheurs à retenir 29 variables (fièvre, tension artérielle, résultats d’analyses, nombres d’interventions antérieures, etc.) pouvant influencer l’établissement du diagnostic d’endocardite infectieuse. Ensuite, six cas, inconnus du RNA, pour lesquels une quantité limitée d’information était disponible, lui ont été soumis. Quatre cas négatifs et l’un des deux cas positifs ont été interprétés correctement par le réseau. Ces résultats préliminaires semblent encourageants pour les chercheurs, qui s’apprêtent à valider leur système par une étude de 100 nouveaux cas inconnus du RNA. Concrètement, explique le Dr Rizwan Sohail au « Quotidien », « un diagnostic positif établi par le réseau de neurones artificiels – seuls seraient retenus les diagnostics ayant une probabilité de certitude de plus de 99 % – permettrait d’éviter le recours à l’échocardiographie transsophagienne, examen utilisé actuellement pour confirmer la pathologie ». Or, « cette procédure n’est pas sans risque pour le patient et coûte cher » précise-t-il. « L’usage d’un système d’aide au diagnostic basé sur un RNA a le potentiel d’améliorer les soins et d’en réduire les coûts », conclut-il.
D’ailleurs, l’enthousiasme du Dr Rizwan Sohail pour les réseaux de neurones artificiels va bien au-delà de sa contribution dans un domaine spécialisé, qui s’ajoute à la liste restreinte d’applications médicales semblables déjà existantes. Ce médecin qui a participé, pour Johns Hopkins International, à l’installation du système d’information d’un hôpital au Moyen-Orient, voit dans l’intelligence artificielle une possibilité de valoriser les collections d’information médicale numérisée en les transformant en outils d’aide à la décision. « On utilise déjà des algorithmes simples pour définir, par exemple, un traitement antibiotique optimal, mais, constate-t-il, il n’existe rien qui puisse servir d’aide pour prendre des décisions complexes. »
Et l’état actuel de la technologie rend, à son avis, le moment propice. « Dans les années 1980 et 1990, dit-il, l’obstacle majeur à l’utilisation des RNA pour l’aide à la décision provenait du fait que les modèles et les programmes informatiques n’étaient pas aisément disponibles aux médecins. Mais, depuis, grâce à l’installation d’intranets institutionnels et aux appareils miniaturisés et portables de l’informatique, ces outils deviennent accessibles pour l’aide à la décision clinique en temps réel, là où les médecins en ont besoin, c’est-à-dire au chevet du patient. » Ce concours de circonstances favorables, selon le Dr Sohail, devrait permettre aux praticiens d’adapter ces instruments à des pathologies courantes, en fonction de leurs besoins personnels, d’autant plus que le savoir-faire développé pour chaque application devrait pouvoir bénéficier à la suivante.
* Interscience Conference on Antimicrobial Agents and Chemotherapy (ICAAC), à San Francisco. septembre 2009.
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