TROP DE CHARGES, trop d’abattage, et l’horizon du burnout : le Dr Bruno Decay a fait le choix de sortir de la convention il y a quelques années ; il se déclare désormais « très heureux ». Devant un parterre de confrères fort attentifs, réunis samedi dernier dans le cadre de la 2e Journée du Syndicat national des ophtalmologistes de France (SNOF), le Dr Decay a expliqué les raisons de cette rupture. « Installé en secteur I depuis 1991, mon cabinet comptait 4 orthoptistes, 2 secrétaires médicales et une infirmière, je voyais 130 personnes par jour : c’était viable jusqu’en 1995 mais avec l’explosion des coûts, les charges devenaient beaucoup trop lourdes. » Tirant partie de la notion d’entreprise médicale qu’il a faite sienne, souhaitant maîtriser ses dépenses et recettes, il se déconventionne donc, et ne se lasse pas d’énumérer aujourd’hui les bénéfices qu’il observe.
« Le déconventionnement change le comportement du médecin et du patient, car le médecin est responsable des deniers du patient, non de la caisse. » Pour le malade, explique le Dr Bruno Decay, finies les listes d’attente de 6 mois, réduites désormais à une semaine. Il reçoit un devis (65 euros pour une consultation spécialisée avec dépistage du glaucome, 50 pour une consultation enfant ou pour un contrôle et tarif de la Sécurité sociale pour les urgences), et peut échelonner ses règlements. Contrairement aux idées reçues, « je n’ai pas que des gens aisés, j’ai également des personnes relevant de la couverture médicale universelle et des étudiants car j’ouvre le samedi », précise l’ophtalmologiste. Qui estime par ailleurs avoir tout à y gagner : « L’ambiance dans le cabinet est bien meilleure, l’accueil des urgences est fluide, je ne fais plus de l’abattage, mais prends en charge 35 patients dans 3 box, je ne vois plus de bobologie, davantage de pathologies complexes, et je peux contracter avec des cliniques pour les actes techniques. » Le plaidoyer semble avoir séduit l’auditoire. À la question : « qui partirait de la convention si le remboursement du patient était assuré ? », de nombreuses mains se sont levées.
La vision syndicale.
Tout autre son de cloche avec le président du Syndicat des médecins libéraux (SML, auquel adhère le SNOF), venu défendre les avancées de la convention. S’il a reconnu avoir davantage « boosté » les spécialités cliniques lors des négociations, le Dr Christian Jeambrun promet de futures retombées pour les ophtalmologistes. Les critères du P4P (paiement à la performance), calculés pour les généralistes, devraient s’étendre aux autres spécialités, avant la prochaine convention. Si les pédiatres, endocrinologues, cardiologues et gastro-entérologues sont les premiers visés, « il faut qu’on en discute avec les ophtalmologistes », a lancé le Dr Jeambrun. Il s’est également engagé à défendre le secteur optionnel avant la fin du mois. Et surtout à faire du lobbying en faveur du statut, reconnu par un certificat de qualification professionnelle, de technicien assistant en soins ophtalmologistes (TASO). « Nous avons la même définition de la délégation de tâche. Ce n’est pas un transfert comme le voudrait la loi HPST : c’est le médecin qui choisit son collaborateur. » Le soutien du SML pourrait n’être pas négligeable, dans la lutte (voir encadré) qui oppose les ophtalmologistes du SNOF, au syndicat national autonome des orthoptistes (SNAO).
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